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14 mai 1610 : assassinat de Henri IV par Ravaillac

Publié le 15/06/2018
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L’assassinat de Henri IV (r. 1589 – 1610) par Ravaillac est un des événements les plus célèbres de l’histoire de France. 

 

1. Henri IV est assassiné le 14 mai 1610 à Paris

Le roi de France Henri IV a été assassiné rue de la Ferronnerie, dans l’actuel 1er arrondissement de Paris (le quartier actuel des Halles), le vendredi 14 mai 1610 aux alentours de quatre heures de l’après-midi. On peut aujourd’hui trouver rue de la Ferronnerie une plaque murale rappelant l’événement ainsi qu’une plaque au sol avec les emblèmes de Henri IV, celui du roi de France et celui du roi de Navarre. Le roi a été poignardé alors qu’il était dans son carrosse, accompagné du duc d’Epernon et du duc de Montbazon, pour aller rendre visite à son conseiller Sully, malade, dans sa résidence de l’Arsenal, et pour inspecter les préparatifs de l’entrée solennelle à Paris de la reine Marie de Médicis, couronnée la veille.

 

2. Ravaillac, l’assassin de Henri IV, est un fervent catholique

François Ravaillac parvint à asséner trois coups de couteau au roi, dont un fut mortel. Après son méfait, il ne chercha pas à s’enfuir. Le duc d’Épernon l’a soustrait à la foule, prête à le lyncher. Ravaillac est né en 1577 ou en 1578 à Angoulême. Catholique fervent, il aurait été sujet à des visions. Il s’est rendu une première fois à Paris en 1609 pour tenter de convaincre Henri IV de protéger le catholicisme et de convertir les huguenots (c’est-à-dire les protestants). Il finit par assassiner le roi, convaincu que la guerre préparée par Henri IV contre les Habsbourg était une guerre dirigée contre le pape et les catholiques. On ne lui a pas trouvé de complice. 

 

3. Henri IV avait été victime de nombreuses de tentatives d’assassinat

Ravaillac ne fut pas le premier à s’être attaqué à la personne du roi. En effet, en 1593, le soldat Pierre Barrière a été arrêté avant d’avoir pu exécuter son projet. Il en fut de même pour Jean Châtel en décembre 1594 ou les frères Guédon en 1595 et 1602. Au total, Henri IV a été la cible de près d’une vingtaine de tentatives d’assassinat. Le roi se savait constamment menacé.

 

4. Henri IV, victime d’un tyrannicide ? 

Pour comprendre l’homme Ravaillac, il faut se remémorer que la France reste sujette au climat violent des guerres de Religion. Ces guerres opposèrent catholiques et protestants, nommés aussi huguenots, ainsi que des clans nobiliaires rivaux qui profitèrent de l’affaiblissement du pouvoir royal pour imposer leur hégémonie. Un puissant parti catholique, la Ligue, se forma à partir de la deuxième moitié du XVIe siècle. Il s’opposait alors brutalement au pouvoir royal. En 1588, les partisans de la Ligue parvinrent à expulser de Paris le roi Henri III, prédécesseur de Henri IV.  Henri III fut finalement assassiné 1589 par le moine Jacques Clément. Henri IV ne fut donc pas la victime d’un acte inouï pour l’époque. 

Bien que le roi fusse considéré comme le père de ses sujets, une courant intellectuel puissant chez les catholiques légitime le tyrannicide. Le roi est considéré comme un tyran (le tyrannicide) s’il ne lutte pas pour le triomphe de leur parti.

 

5. Les motifs de la mort de Henri IV

L’avènement de Henri IV, roi de France à partir d’août 1589, mit fin à ces guerres de religion. Sa légitimité, dynastique avant tout, reposait aussi sur son statut de pacificateur. Cependant, cette légitimité dynastique n’était pas des plus solides. Henri IV fut d’abord roi de Navarre. Il n’était cousin qu’au 22e degré de Henri III. En outre, Henri IV, bien que né catholique, changea plusieurs fois de religion. Il abjura définitivement le protestantisme en 1593 et se convertit finalement au catholicisme. Sa fidélité au catholicisme put donc être remise en cause par les membres du parti catholique. Henri IV ne resta-t-il pas protestant de cœur ?

Surtout, le règne de Henri IV fut marqué par la promulgation de l’édit de Nantes, le 30 avril 1598. Cet édit de tolérance donna des droits aux protestants. Il autorisa donc l’existence « d’hérétiques », aux yeux des catholiques fervents, au sein du royaume de France. L’édit de Nantes institua en France un modus vivendi inacceptable pour plus fervents catholiques, notamment aux fidèles de la Ligue catholique.

Enfin, Henri IV prépara, avant son assassinat, une guerre contre les Habsbourg, dynastie qui était alors la principale représentante du catholicisme en Europe, pour soutenir notamment certains princes protestants. Cette politique étrangère ne fut-elle pas un signe de sa fidélité conservée au protestantisme ? Des rumeurs disaient au reste le roi de vouloir envahir les Pays-Bas espagnols pour un motif futile : retrouver Charlotte de Montmorency, femme du prince de Condé, qui l’a emmenée avec lui à Bruxelles.

Il faut enfin ajouter que le déclassement de la noblesse, endettée auprès des bourgeois, et une pression fiscale grandi, ont été d’autres sources de mécontentement.

Ces éléments ont alimenté l’idée que l’acte de Ravaillac n’était pas isolé. Au contraire, l’assassinat aurait pu être commandé par les nombreux ennemis politique de Henri IV : Habsbourg, catholiques ultras, jésuites, etc.

 

5. Des motifs mystérieux, un procès bâclé

L’historien Jean-Christian Petifils, dans L’assassinat d’Henri IV, émet l’hypothèse que le régicide aurait pu être commandité par Albert d’Autriche, qui était alors archiduc souverain des Pays-Bas. Les terres qu’ils gouvernaient étaient alors menacées par les armées de Henri IV. En outre, l’historien rappelle que le procès, expédié en douze jours, a été bâclé. Des témoins essentiels n’ont pas été interrogés et des individus arrêtés n’ont pas été jugés.

 

6. Le supplice de Ravaillac a été très cruel

Ravaillac fut condamné à mort à l’issue de son procès. Le supplice se déroula le 27 mai 1610. Le matin, Ravaillac fut soumis au supplice des brodequins pour le forcer à dénoncer d’éventuels complices. On encercla ses jambes de planches de bois, pour le faire souffrir en augmentant la pression qu’elles exerçaient sur lui. Mais le supplicié fut sur le point de perdre connaissance avant d’avoir avoué quoi que ce soit.

Après avoir demandé pardon à Dieu et au roi, on le conduisit place de Grève, l’actuelle place de l’Hôtel-de-Ville. On punit d’abord la main régicide en faisant couler du soufre fondu dessus. La peau, les muscles puis les tendons furent carbonisés. Des valets arrachèrent des morceaux de sa chair avec des tenailles portées au rouge. On cautérisa les plaies avec de l’huile bouillante et du plomb fondu. Enfin, on écartela Ravaillac en attachant chacun de ses membres à un cheval. Il mourut après trente minutes. La foule arracha alors ses membres.

 

7. La mort de Henri IV n’a pas modifié la politique française

À la mort de Henri IV, son fils, Louis XIII, n’était âgé que de huit ans. La femme de Henri IV et mère de Louis XIII, Marie de Médicis, dut prendre la régence. Cette période fut marquée par une réorientation politique : Marie de Médicis essaya d’installer la France dans une alliance avec l’Espagne, dirigée par une branche de la maison de Habsbourg. Elle fut aidée en cela par son favori Concino Concini, entré au conseil des Finances en juillet 1610, qui devint maréchal de France en novembre 1612. Les conseillers de Henri IV furent écartés. Sully démissionna en janvier 1611. Élément clé de cette politique, Louis XIII fut marié à une princesse espagnole, Anne d’Autriche.

Cependant, la régence de Marie de Médicis prit fin en 1614. Elle ne perdit pas son influence, mais par un coup de force, Louis XIII prit le pouvoir en 1617, écarta sa mère et fit assassiner Concini. Le long règne de Louis XIII, qui s’étendit jusqu’en mai 1643, ne modifia par l’orientation politique du royaume, décidée par Henri IV. Il fut marqué par le ministère de Richelieu qui devint principal ministre d’État à partir de 1624. La politique de Louis XIII fut marquée par :

  • le maintien de l’édit de Nantes ;
  • la progression de l’absolutisme, qui se manifeste notamment par une politique d’abaissement des grands et de soumission des principales places protestantes ;
  • une lutte contre les Habsbourg en Espagne et en Allemagne (guerre de Trente Ans) ;

 

8. La naissance du mythe de Henri IV

Henri IV est un roi qui fait encore aujourd’hui l’objet d’une révérence particulière. Un mythe s’est constitué autour de sa personne, celui du « bon roi Henri IV», aimé par son peuple et soucieux de son bonheur. Ainsi, selon la légende, le roi aurait voulu que chaque sujet d’un royaume ravagé par des longues guerres intestines puisse se nourrir d’au moins une poule au pot, plat transformé en quasi emblème national. Une politique sociale avant l’heure, d’un certain point de vue.

Cette image d’Épinal trouva peut-être son origine dans la fin tragique du règne d’Henri IV. Celui qui rétablit en France la paix civile devint le dernier roi de France assassiné, malgré la tentative de Damiens en janvier 1757 contre Louis XV.

L’œuvre de Voltaire n’est pas non plus innocente. Lui qui était parvenu à transformer le XVIIe siècle en Siècle de Louis XIV (selon le titre d’un livre très célèbre paru en 1751) avait publié, dans sa jeunesse, une longue épopée à l’honneur de Henri IV, La Henriade (1723).

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À lire

  • Roland Mousnier, L’Assassinat d’Henri IV (livre ancien, 1965)
  • Jean-Christian Petitfils, L’Assassinat d’Henri IV