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« Clore » ou « clôturer » : quelle différence ?

Publié le 20/03/2018
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Les verbes « clore » et « clôturer » sont utilisés indifféremment dans l’usage pour dire « fermer » ou « terminer ». Ils sont synonymes au sens de « fermer d’une clôture, d’une enceinte ». Ce sont en outre des paronymes, ce qui peut d’autant plus prêter à confusion.

Clore : fermer

« Clore », qui vient du latin claudere, « fermer », est utilisé en français moderne au sens de « mettre fin », en parlant d’un débat, d’un discussion, d’une séance. Cependant, « clore » est un verbe défectif : certains temps ou certaines personnes n’existent plus dans l’usage. L’existence des verbes défectifs, dans lesquels on peut aussi trouver « ouïr, sourdre » ou « accroire », est souvent condamnée par l’usage. Ainsi, on utilise encore couramment la première et la troisième personne du singulier du présent de l’indicatif de « clore » (je clos, il clôt), le participe passé (clos, close), son infinitif et, beaucoup plus rarement, l’impératif (clos). On le trouve dans des expressions comme « maison close, huis clos, clore les yeux, clore la marche, l’incident est clos », etc. Exemples

  • La séance est close.
  • L’incident est clos.
  • Il clôt son compte en banque.
  • Malgré son retard, elle a eu bien du mal à clore la conversation avec son voisin.
  • Clore un dossier. 
  • Je clos les yeux lentement avant de me coucher.

Pour parler du fait que l’on ferme ou que l’on bouche un passage ou une ouverture, on préfère désormais les verbes fermer, boucher, etc. « Clore » ne s’entend plus non plus dans l’usage comme « fermer d’une clôture ». On lui préfère, par exemple, « entourer d’une clôture ».

Clôturer : fermer d’une clôture

L’emploi au sens figuré de « clôturer » pour dire « terminer » ou « fermer » est condamné par l’Académie qui ne lui reconnaît que son sens propre, c’est-à-dire « enclore, fermer d’une clôture ». On peut dire, ainsi, « clôturer des prés ». Exemples

  • Le paysan avait clôturé ses prés. 
  • Je clôture le champ pour le protéger des vaches. 

Comme synonyme de « terminer », il faudrait donc préférer à « clôturer » les verbes « clore, mettre fin à; mettre un terme à » ou « conclure ». L’Académie reconnaît cependant le sens figuré de « clôture » dans la locution « clôture de la bourse ». Si l’on souhaite éviter d’utiliser « clôturer » au sens de « terminer », on peut contourner cette difficulté en utilisant le substantif « la clôture de… ».

« Clôturer », un verbe préféré par l’usage ?

Cependant, « clôturer » a l’avantage, contrairement à clore, de ne pas être un verbe défectif : on peut donc supposer qu’il sera préféré par l’usage. Le Littré, dictionnaire du XIXe siècle, reconnaît déjà l’utilisation de « clôturer » pour « clôturer un compte », « clôturer les débats » ou « clôturer un inventaire ». En outre, certains grands écrivains, de l’Académie française notamment, ont employé « clôturer »dans le sens condamné par cette même Académie. Exemples cités par Le Bon Usage :

La première partie [du spectacle] fut clôturée par une fort belle passe d’armes 

Maupassant, Bel Ami

[…] tous les étudiants […] eussent-ils, cette année, suivi la retraite pascale qui fut clôturée par leur archevêque ? 

Mauriac, Journal

Toute la ferveur allait aux hussards qui clôturaient la revue dans l’apothéose d’un galop de charge

Aymé, La Jument verte

De façon générale, toute la Bourse clôtura en baisse.

Druon, Les Grandes Familles

Chez Proust, on trouve l’emploi de « clôturer » au sens de fermer : «  Il s’aperçut que je le voyais et aussitôt clôtura hermétiquement le grillage qu’il avait laissé entr’ouvert. ». Cependant, on évitera de modifier les expressions formées avec « clore » : « les yeux clôturé, une maison clôturée, l’incident est clôturé », etc.