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La guerre de Sept Ans (1756 – 1763)

Publié le 31/05/2017
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De 1756 à 1763, la Guerre de sept ans a embrasé l’Europe, l’Amérique du Nord et le sous-continent indien. Ce conflit opposa deux blocs :

  • Le premier était composé de la France, l’Autriche, la Suède, la Russie et plus tard l’Espagne.
  • Le deuxième de la Prusse alliée à la Grande-Bretagne.

Toutes les grandes puissances européennes de l’époque étaient ainsi engagées dans cette guerre. Chacun de ces pays avait ses propres objectifs, parfois sans aucun lien avec ceux de ses alliés, ce qui donna à la guerre de Sept Ans son caractère complexe. Cette guerre se termina sur un statu quo territorial en Europe mais accoucha d’un nouveau rapport de force entre ses États, consacrant la montée en puissance de l’Angleterre et l’entrée en scène de la Russie à l’Est du continent, de même qu’un affaiblissement relatif de la France jusqu’alors considérée comme la première puissance du continent.

 

L’Europe avant la guerre de Sept Ans : un fragile équilibre des forces

Carte de l'Europe guerre de Cent Ans
Carte de l’Europe en 1750 | Wikimedia Commons | La guerre de Sept Ans

L’ordre européen avec la guerre de Sept Ans

L’ordre européen de 1750 repose sur un équilibre des forces entre plusieurs puissances à la légitimité variable. La France des Bourbons et l’Autriche des Habsbourg sont ainsi des puissances établies dont le rôle majeur a notamment été consacré par les traités d’Utrecht de 1713 et de Rastatt de 1714. La première doit faire face à la montée de la Grande-Bretagne, désormais stable politiquement et dont la forte expansion coloniale menace ses possessions en Amérique du Nord. À l’inverse, l’Espagne, appauvrie et loin de sa gloire passée, est désormais une puissance de second rang sur le continent  malgré son vaste empire colonial et une marine efficace. Ayant perdu ses possessions italiennes et néerlandaises, elle souffre désormais d’une position excentrée.

 

La montée en puissance de la Russie

Au cours de la première moitié du XVIIIe siècle, de nouveaux États émergent et contestent l’ordre établi. C’est d’abord le cas de la Russie qui, grâce à sa guerre contre la Suède, de 1700 à 1721, remplace cette dernière comme principale puissance de la mer Baltique. Dans les décennies suivantes, c’est au détriment de l’Empire Ottoman que les souverains russes poursuivent leur expansion vers le Sud.

 

La montée en puissance de la Prusse

Toutefois, c’est avant tout la montée en puissance de la Prusse, au sein de l’espace germanique, qui perturbe l’équilibre sur lequel repose la paix de l’Europe. En effet, en 1740, profitant de la succession contestée de l’empereur Charles VI par sa fille Marie Thérèse, Frédéric II de Prusse attaque sa voisine par surprise. À l’issue d’un conflit de huit ans, il lui arrache la riche province de Silésie bien que l’impératrice parvienne à conserver sa couronne en envahissant son rival bavarois. Un nouvel affrontement entre l’Autriche et la Prusse apparaît dès lors plausible, d’autant que la première se lance dans une frénésie de réformes afin de moderniser son administration et son armée.

 

Un renversement d’alliance qui annonce la guerre de Sept Ans

La guerre de Sept Ans
Les alliances au cours de la guerre de Sept Ans. En bleu, Grande-Bretagne, Prusse et Portugal. En vert, France, Autriche, Espagne et Russie | Wikimedia Commons | La guerre de Sept Ans

Une alliance Autriche – Angleterre fragilisée

Au cours de cette la guerre de succession d’Autriche (1740-1748), la France avait combattu avec la Prusse tandis que l’Autriche avait bénéficié de l’aide de la Grande-Bretagne. Cette dernière alliance reste toutefois fragile. En effet, les Britanniques ne sont intervenus que tardivement pour éviter une victoire française en Allemagne, d’autant que le Hanovre, dont l’électeur était aussi le roi d’Angleterre, pouvait être menacé. En outre, Marie-Thérèse leur reproche de ne lui avoir apporté qu’un soutien tiède. Dans le même temps, la France n’a plus guère de contentieux avec la maison de Habsbourg, ce qui ouvre la voie à une alliance entre les deux principales puissances catholiques du continent.

 

Vers le renversement d’alliance 

C’est le très francophile chancelier Wenzel von Kaunitz, l’ambassadeur autrichien à Paris Starhemberg et le cardinal de Bernis qui opèrent ce rapprochement qui ne peut qu’inquiéter la Prusse. Celle-ci doit alors se mettre en quête de nouveaux alliés et se tourne naturellement vers l’Angleterre, principale rivale de la France et pays protestant dont le roi Georges II est l’oncle de Frédéric II. Les conditions sont alors réunies pour un retournement d’alliance, bien que celui-ci soit vu avec réticences par de nombreux membres des cours de Vienne et Versailles.

 

Le renversement définitif

Les événements s’accélèrent en 1756. En janvier, la Prusse et la Grande-Bretagne signent un accord. En mai, c’est au tour de la France et de l’Autriche d’officialiser leur alliance par le traité de Versailles. Désormais, les deux plus puissantes familles d’Europe entendent agir de concert, même si l’accord qu’elles signent reste, pour l’heure, purement défensif.

 

 

Le début de la guerre de Sept Ans

 

L’offensive prussienne

Le roi de Prusse n’a guère de doute sur les intentions belliqueuses de l’Autriche, qui seules justifient son alliance avec la France. Frédéric II, sachant ses ressources limitées, opte pour une stratégie agressive visant à rapidement envahir la Bohême et au-delà, l’Autriche. Pour cela, il estime toutefois avoir besoin de neutraliser la Saxe, qui pourrait menacer son flanc durant son offensive contre les Habsbourg. Surtout, les ressources de cette région, l’une des plus riches d’Allemagne, doivent lui permettre de soutenir un conflit majeur contre l’alliance franco-autrichienne. L’armée prussienne prend dès lors les devants. À la fin de l’été 1756, elle envahit la Saxe qui est incapable de lui résister longtemps. Une armée autrichienne, dirigée par Browne, tente de secourir les Saxons mais elle est battue à la bataille de Lobositz le 1er octobre. Toutefois, l’affrontement est indécis et les pertes prussiennes y sont lourdes. Frédéric II pressent dès cet instant que le nouveau conflit sera bien plus difficile que la guerre de succession d’Autriche.

 

Le début du conflit franco-anglais en Europe

Au même moment, de l’autre côté de l’Atlantique, la Grande-Bretagne et la France se disputent la domination de l’Amérique du Nord, où les combats, en réalité, ont commencé dès 1754. Le début de la guerre de Sept Ans a pour effet de les lier au conflit en Europe. La stratégie de Louis XV, en effet, est d’y obtenir des gains territoriaux en profitant de la supériorité numérique de son armée, alors que la suprématie navale britannique rend difficile l’approvisionnement du Canada. Les territoires occupés pourraient ensuite être échangés contre des colonies. La France cherche en particulier à occuper le Hanovre. En 1757, l’armée française, après la victoire de Hastenbeck, parvient à imposer ses propres conditions au Hanovre, au Hesse et au Brunswick avec la convention de Klosterzeven. Toutefois, l’Angleterre refuse de ratifier ce traité, qui ne sera jamais appliqué, et la guerre se poursuit donc.

 

L’enlisement de la guerre de Sept Ans en Europe orientale

guerre de cent ans frederic II
Représentation de Frédéric II, martial et triomphant, à la bataille de Zorndorf, Carl Röchling | Wikimedia Commons | La guerre de Sept Ans

Panique en Prusse

La Prusse doit attendre 1757 pour reprendre l’offensive, dirigée cette fois-ci contre les territoires des Habsbourg. Frédéric II vise en particulier la capitale de la Bohême, Prague. Il assiège la ville mais doit ensuite faire face à une contre-attaque dirigée par le maréchal autrichien Daun qui l’oblige à accepter une bataille rangée. Contre toute attente, la bataille de Kolin, en juin 1757 se conclut par une nette victoire autrichienne et met fin à la réputation d’invincibilité de la Prusse. Défait, le roi Frédéric doit se replier mais il n’est pas poursuivi par l’armée autrichienne du fait d’une prudence sans doute excessive de Daun.

Au même moment, la Russie entre en guerre contre la Prusse, occupe la ville de Memel et bouscule un corps prussien à la bataille de Gross-Jägersdorf. Elle ne peut ensuite assiéger Könisberg et doit se replier et abandonner tous ses gains. Cependant, l’entrée en guerre de ce nouvel État, disposant d’une immense armée, constitue une lourde menace pour Frédéric II. En outre, profitant de son apparente faiblesse, la Suède l’attaque à son tour, en envoyant ses forces en Poméranie tandis que la France avance vers l’est.

 

La Prusse renverse la situation

A la fin de l’année 1757, alors qu’il semble sur le point de perdre, le roi de Prusse renverse pourtant magistralement la situation. Le 5 novembre, il écrase une armée française à Rossbach, avant de battre les Autrichiens dirigés par le médiocre Charles Alexandre de Lorraine à Leuthen. En utilisant ses lignes intérieures, il est parvenu à rapidement déplacer son armée d’un front à l’autre tandis que sa tactique audacieuse de l’ordre oblique, visant à percer les lignes adverses en un seul point, lui a permis de remporter des victoires sur des forces numériquement supérieures.

 

L’enlisement de la guerre de Sept Ans

En 1758, pourtant, le conflit s’enlise. Les Prussiens assiègent la ville bohémienne d’Olmütz mais doivent se replier après une défaite de l’un de leurs corps à Domstadtl. En août, Frédéric II doit à nouveau déplacer son armée sur un autre front, afin de repousser les Russes qui ont occupé la Prusse-Orientale au début de l’année. Il y parvient à la bataille de Zorndorf, non sans subir de lourdes pertes. En revanche, en octobre, le roi de Prusse subit une défaite sévère face aux Autrichiens de Daun à Hochkirch. À la fin de l’année, sa situation est donc loin de s’être améliorée. 

 

Poursuite de la guerre de Sept Ans en Amérique

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La victoire des troupes de Montcalm à Carillon, Henry Alexander Ogden | Wikimedia Commons | La guerre de Sept Ans

Accalmie en Allemagne

Après Rossbach, l’armée française ne se bat plus contre la Prusse, mais se contente d’attaquer les forces hanovriennes, renforcées par un contingent britannique et des troupes prussiennes, en Allemagne de l’Ouest. Elle n’obtient toutefois que peu de succès et est battue par Ferdinand de Brunswick-Lünebourg à Krefeld en juin 1758. Les Français parviennent cependant à conserver des positions sur le Rhin.

 

Les victoires du marquis de Montcalm en Amérique

La situation en Amérique du Nord paraît nettement plus prometteuse pour le royaume des Bourbons malgré son infériorité numérique face à l’ennemi britannique. En 1756, l’armée française, dirigée par le marquis de Montcalm, anéantit un corps britannique commandé par le général Braddock. L’année suivante, il déclenche une offensive et prend le fort William-Henry, qui semble lui ouvrir la porte d’Albany (aujourd’hui située dans l’État de New York). S’il ne peut lancer d’offensive faute d’hommes, Montcalm remporte un nouveau succès en 1758 à la bataille de fort Carillon où il parvient à repousser une armée anglaise cinq fois supérieure en nombre.

 

Un changement du rapport de force

Toutefois, l’avenir s’assombrit rapidement après cette victoire. Le principal ministre français, le marquis de Choiseul, décide de se concentrer sur l’Europe à partir de 1758 d’autant que l’action de la Royal Navy entrave l’approvisionnement des colonies françaises d’Amérique. Au moment où les Français se concentrent sur la possibilité d’une invasion de la Grande-Bretagne, dans un mouvement inverse, les Britanniques renforcent leurs propres positions en Amérique du Nord. Ce rapport de force sans cesse plus défavorable à Montcalm l’empêche de lancer une grande offensive contre les colonies britanniques et le contraint rapidement à mener une guerre défensive.

 

L’année 1759, tournant de la guerre de Sept Ans

guerre de sept ans bataille des cardinaux ou baie de quiberon
Bataille des Cardinaux ou bataille de la baie de Quiberon, Richard Paton | Wikimedia Commons | La guerre de Sept Ans

Une Prusse acculée…

À l’est, l’année 1759 semble consacrer la défaite de la Prusse, de plus en plus acculée par ses adversaires. En août, elle subit un très lourd revers à la bataille de Kunersdorf contre des Autrichiens et des Russes qui parviennent enfin à coordonner leur action. En effet, l’armée qui inflige à Frédéric la plus importante défaite de sa carrière est constituée d’environ deux tiers de Russes et d’un tiers d’Autrichiens, et c’est le contingent de l’Empire Habsbourg, dirigé par l’agressif Ernst von Laudon, qui procède à la manœuvre décisive entraînant la débandade prussienne.

 

…mais qui résiste

L’alliance a cependant subi de lourdes pertes (environ 15 000 tués et blessés sur 60 000 hommes au total) elle aussi et se révèle incapable de poursuivre son avantage tandis que dans les jours suivant la bataille, le roi de Prusse parvient à progressivement rallier ses troupes, tout en obtenant des renforts venus d’autres fronts. Si les Prussiens ne peuvent désormais plus songer à une victoire décisive dans le conflit, ils parviennent encore à tenir leur territoire. En octobre 1759, ils défendent ainsi avec succès la forteresse de Kolberg en Poméranie contre une armée russe. Ils subissent toutefois un nouveau revers important contre l’Autriche à Maxen, où un corps d’armée prussien d’environ 15 000 hommes est capturé par les forces de Laudon.

 

L’annus mirabilis pour la Grande-Bretagne

Sur le front ouest, les Prussiens sont soulagés par les succès de Ferdinand de Brunswick contre les Français. Après avoir d’abord dû reculer à Bergen, son armée anglo-hanovrienne remporte un succès décisif à Minden le 1er août. Ce succès écarte définitivement toute menace sur le Hanovre et il conforte l’effort de guerre britannique. 1759, de fait, est surnommée l’annus mirabilis en Grande-Bretagne. En effet, celle-ci remporte également deux victoires décisives sur les mers à la bataille de la baie de Quiberon, qui met fin à toute possibilité pour la France d’intervenir militairement dans les îles britanniques, et à Lagos au large du Portugal.

 

La chute du Canada français

Surtout, 1759 est l’année de la chute du Canada français. Face à une armée désormais très supérieure en nombre, le marquis de Montcalm ne peut plus défendre la ville de Québec qui tombe en septembre après un siège de plusieurs mois et d’une bataille de quelques heures au cours de laquelle le général français et son homologue anglais, James Wolfe, sont tous les deux tués. Peu de temps après cette défaite décisive, l’armée française perd également la bataille de Niagara tandis qu’un dernier succès à Sainte-Foy en 1760 ne permet pas de reprendre la capitale du Canada français. À l’automne, les Britanniques envahissent Montréal sans résistance. Le rêve américain des Bourbons a vécu.

 

Match nul en Europe centrale

 

Attentisme russe

Après son retrait suite à la bataille de Kunersdorf en 1759, l’armée russe se montre largement passive durant deux ans, à l’exception d’une nouvelle tentative manquée de prendre Kolberg en 1760. Cela permet à Frédéric II de se concentrer sur l’Autriche. Son armée subit pourtant une succession de revers durant de long mois : défaite du général prussien Fouqué à Landshut en juin, siège manqué de Dresde en juillet et perte de Glatz en Silésie peu de temps après.

 

Victoire prusse à la bataille de Torgau

Frédéric II va pourtant retourner la situation. Le 15 août, il remporte une franche victoire contre Laudon à Liegnitz, tandis qu’une autre armée autrichienne, dirigée par Daun, campe inexplicablement sur ses positions et ne participe pas à la bataille.

En octobre 1760, le roi de Prusse doit retourner vers sa capitale, Berlin, brièvement occupée par un corps austro-russe dirigé par les généraux Lacy et Tottleben, mais il se remet ensuite en marche vers la Saxe où il remporte la victoire de Torgau le 3 novembre sur l’armée du maréchal Daun.

Cette bataille, l’une des plus sanglantes du XVIIIe siècle, apparaît alors comme une victoire à la Pyrrhus : les Prussiens sont passés proches du désastre et ont subi des pertes encore plus lourdes que les Autrichiens  qui se sont repliés en bon ordre. L’échec de ceux-ci, en réalité, est essentiellement dû à une blessure de Daun qui a désorganisé leur armée alors qu’elle était proche de l’emporter.

 

Épuisement des forces

La bataille convainc toutefois Marie-Thérèse de l’impossibilité d’obtenir un succès décisif qui lui permettrait de reprendre la Silésie, sauf en cas d’intervention russe massive. En effet, à la fin de l’année 1760, les positions des deux belligérants n’ont pratiquement pas changé tandis que la trésorerie autrichienne, déjà mal en point, souffre d’une diminution de l’aide financière française. L’armée des Habsbourg, qui par ailleurs n’ose pas recourir à la conscription, doit alors réduire la taille de ses unités, au moment où la Prusse, bien que très affaiblie, mobilise ses dernières réserves.

Cette situation explique la relative inaction qui caractérise la majeure partie de l’année 1761, au cours de laquelle les Autrichiens doivent se contenter de prendre la forteresse de Schweidnitz (Silésie) grâce à une opération audacieuse du maréchal von Laudon.

 

Offensive russe

La Russie, moins épuisée par le conflit, semble alors en mesure de faire basculer le rapport de force à l’avantage de son alliée. En effet, elle lance finalement une nouvelle offensive contre Kolberg en juillet 1761. Le siège de la forteresse se prolonge et dure plus de cinq mois, tandis que les Russes sont considérablement gênés par l’action du général Platen qui attaque leurs arrières et remporte plusieurs succès, notamment à Göstin et Posen. Toutefois, il ne parvient pas à libérer Kolberg et la garnison prussienne doit capituler le 16 décembre. Si cette victoire doit permettre à l’armée russe d’attaquer directement le Brandebourg, elle est obtenue trop tard pour qu’elle puisse le faire avant le printemps 1762.

 

De Pierre III et Catherine II

Or, la tsarine Elisabeth de Russie meurt peu de temps après la fin du siège de Kolberg. Son successeur Pierre III est un admirateur de Frédéric II. Prince d’origine allemande, il souhaite s’allier à la Prusse afin d’affronter le Danemark, ce qui ne peut manquer d’alarmer Marie-Thérèse. Heureusement pour l’Autriche, Pierre III est déposé et tué en juillet 1762 et Catherine II – pourtant elle-même fille d’un général prussien – qui lui succède n’a aucunement l’intention d’honorer la nouvelle alliance de la Russie avec la Prusse. Restée largement inactive durant plusieurs années, la Suède met également fin à son intervention en Allemagne en 1762.

 

Rétablissement de la situation pour la Prusse

Ces événements revigorent Frédéric II qui remporte la bataille de Burkersdorf (Silésie) contre le maréchal Daun en juillet 1762, permettant la reprise de Schweidnitz peu de temps après. Enfin, le 29 octobre de la même année, son frère Henri de Prusse bat une autre armée autrichienne à Freiberg en Saxe. À la fin de l’année, la Prusse a ainsi repris presque tous les territoires qu’elle avait perdus depuis 1760 à l’exception de Glatz. Elle ne peut toutefois déloger les Autrichiens du sud de la Saxe ou attaquer leur territoire.

 

Quand la guerre de Sept Ans devient un calvaire pour la France

 

Une armée française inefficace 

Si, en 1760 et 1761, la Prusse lutte pour sa survie en tant que puissance, elle peut toutefois compter sur une action efficace de ses alliés britannique et hanovrien qui tiennent en échec une armée française décidément inefficace et l’empêche d’opérer la moindre jonction avec l’Autriche. Ferdinand de Brunswick continue en effet de remporter des victoires. Le 31 juillet 1760, il bat les Français à Warburg. Avec le soutien d’un corps prussien, il récidive à Langensalza le 15 février 1761 avant d’avancer sur Cassel. S’il ne peut alors prendre la ville, le duc de Brunswick remporte une victoire décisive sur les armées des ducs de Soubise et de Broglie à Vellinghausen en Westphalie. Cette terrible défaite met définitivement fin aux espoirs français d’obtenir un succès sur le front allemand et, à la fin de l’année 1762, Cassel finit également par tomber.

 

La France battue en Inde

À plusieurs milliers de kilomètres du continent européen, en Asie, la France est également battue en Inde. Elle perd en effet la bataille de Wandiwash en 1760 et la ville de Pondichéry en 1761 ainsi que toutes ses autres possessions indiennes. Il faut alors noter que sur ce front très secondaire, les forces françaises sont encore plus limitées en nombre et mal approvisionnée qu’en Amérique du Nord. Leur isolement explique largement leur incapacité à s’opposer à la compagnie britannique des Indes orientales disposant de davantage de ressources et du soutien de la Royal Navy.

 

Désastre au Portugal

En désespoir de cause, le pouvoir français parvient à engager son allié espagnol dans le conflit. En 1762, les forces franco-espagnoles se lancent ainsi à l’assaut du Portugal mais leur offensive se termine en véritable désastre. En effet, elles sont anéanties au bout de quelques mois par une armée anglo-portugaise commandée par un général allemand, le comte de Schaumbourg-Lippe. Cette nouvelle humiliation sonne le glas de l’effort militaire français lors de la Guerre de Sept Ans.

 

La fin de la guerre de Sept Ans : nouveau rapport de forces

 

La guerre de Sept Ans, deux conflits

Le terme de  « guerre de Sept Ans » désigne en réalité deux conflits, devenus de plus en plus distincts au cours des opérations militaires. D’une part, une lutte entre la Prusse et l’alliance austro-russe (renforcée de manière accessoire par la Suède) pour la suprématie en Europe centrale. D’autre part, un affrontement impitoyable à l’échelle mondiale entre la France et la Grande-Bretagne, celle-ci s’appuyant largement sur les forces de l’électorat du Hanovre et ses alliés allemands en Europe.

 

En Europe centrale, une guerre de Sept Ans sans grand impact territorial

Le premier conflit de la guerre de Sept Ans se solde finalement par un match nul. En 1763, alors que des négociations se tiennent entre les belligérants, la Prusse occupe presque tous les territoires qu’elle tenait à la fin de 1756, comprenant notamment le nord de la Saxe et la Silésie à l’exception de Glatz. Elle est toutefois épuisée et dévastée tandis qu’en face, l’Autriche, en difficulté financière, est toutefois solidement retranchée en Saxe du sud (y compris la capitale de l’État, Dresde) et en Bohême. Cette situation pousse au statu quo ante bellum. Marie-Thérèse d’Autriche essaie un temps de conserver le contrôle de Glatz mais elle n’insiste pas devant le refus prussien. Au traité d’Hubertsbourg (1763), elle n’obtient que deux concessions de la part de Frédéric II : le repli prussien de la Saxe occupée en 1756 et la promesse (finalement tenue) du roi de Prusse de voter pour son fils Joseph lors de la prochaine élection impériale.

Une victoire de la Prusse ? 

Ce conflit en Europe centrale est généralement considérée comme une victoire prussienne, la Prusse parvenant à conserver la Silésie et étant définitivement reconnue comme une grande puissance européenne. Le pays termine pourtant le conflit très affaibli et dévasté, avec d’importantes pertes démographiques. Cette situation, et la bonne tenue de l’armée autrichienne au cours du conflit, semble influer sur le comportement du roi Frédéric après la guerre. Si le roi de Prusse conserve des velléités expansionnistes, comme en atteste le partage de la Pologne en 1772, il ne se risquera plus jamais à tenter une bataille rangée contre l’Autriche, ni à un conflit contre la Russie.

De son côté, malgré ses difficultés à partir de la fin de 1760, l’Empire Habsbourg termine la guerre en meilleur état que son rival du Nord mais Marie-Thérèse prend conscience de la nécessité de poursuivre son effort de modernisation administrative et militaire qui n’a pas pleinement porté ses fruits.

Si la Russie n’a rien gagné en termes de territoire, son intervention remarquée en Allemagne lui confère définitivement un statut de grande puissance européenne, que Catherine consolidera d’ailleurs considérablement.

 

La guerre de Sept Ans : l’autonomie de l’ordre est-européen

Enfin, d’une manière générale, la guerre de Sept Ans consacre l’apparition d’un ordre est-européen autonome, reposant sur ces trois États qui peuvent désormais agir sans le soutien des pays occidentaux. La première victime de ce nouveau système diplomatique sera la Pologne à partir des années 1770.

 

À l’Ouest, victoire anglaise décisive

Quant à l’affrontement franco-anglais, il se termine par une victoire sans appel de ces derniers. Au traité de Paris, signé le 10 février 1763, la France perd l’ensemble de ses possessions canadiennes et cède également la Louisiane orientale (à l’est du Mississipi) et plusieurs îles des Caraïbes à la Grande-Bretagne. En réalité, dès 1762, elle avait également cédé la Louisiane à l’Espagne afin de l’attirer dans le conflit. Une intervention qui au demeurant s’était révélée désastreuse…Les Britanniques obtiennent aussi la Floride, au détriment de l’Espagne, mais rendent à la France ses possessions indiennes occupées pendant la guerre.

Au-delà des pertes territoriales, le prestige de la monarchie française est sérieusement atteint lors de ce conflit. Vaincue en Amérique et en Inde, son armée a également subi une succession de défaites embarrassantes contre le Hanovre, il est vrai appuyé par des troupes britanniques et parfois prussiennes, en Allemagne. Alors que l’Autriche comptait sur la France dans sa lutte contre la Prusse, elle a rapidement dû se tourner vers la Russie dont l’intervention s’est révélée plus efficace. Enfin, le traité de Paris met de facto fin à l’expansion coloniale du royaume de France, au moment même où la Grande-Bretagne se lance à la conquête de la majeure partie de l’Inde.

 

 

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