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Rue Danton à Paris : histoire, patrimoine et évolution
rue danton Paris

Publié le 04/05/2025
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Au cœur du 6e arrondissement de Paris, la rue Danton se dévoile comme une artère chargée d’histoire. Reliant le Boulevard Saint-Germain à la place Saint-Michel, cette voie parisienne d’environ 120 mètres offre un condensé fascinant du Paris historique et intellectuel. Son nom résonne avec l’histoire révolutionnaire française, tandis que son emplacement stratégique en fait un passage incontournable du Quartier Latin. Que vous soyez passionné d’histoire, amateur d’architecture ou simplement curieux de découvrir les secrets du Paris authentique, la rue Danton vous invite à un voyage dans le temps et l’espace parisien.

Situation géographique et caractéristiques principales


La rue Danton s’étend sur une distance modeste mais significative dans le paysage urbain parisien. Située dans le 6e arrondissement, elle constitue un maillon essentiel reliant deux points névralgiques de la rive gauche : le Boulevard Saint-Germain au nord et la place Saint-Michel au sud. Cette position stratégique lui confère un rôle de passage important dans la circulation du quartier Latin.

Administrativement, elle se trouve dans le quartier de la Monnaie, l’un des quatre quartiers administratifs du 6e arrondissement. Son code postal est le 75006, et elle s’inscrit dans un tissu urbain dense, caractéristique du centre historique parisien. Les coordonnées géographiques précises de la rue sont 48° 51′ 08″ N pour la latitude et 2° 20′ 27″ E pour la longitude.

Relativement courte avec ses 120 mètres de longueur et ses 20 mètres de largeur, la rue Danton présente néanmoins une perspective intéressante. En l’empruntant depuis le Boulevard Saint-Germain, vous descendez légèrement vers la Seine, avec une vue qui s’ouvre progressivement sur la fontaine Saint-Michel. Cette configuration topographique, avec sa légère déclivité, est typique des rues parisiennes qui s’approchent du fleuve.

Origine du nom : Georges Jacques Danton

Georges Jacques Danton
Georges Jacques Danton

La rue honore la mémoire de Georges Jacques Danton (1759-1794), figure emblématique de la Révolution française. Avocat de formation, Danton s’est imposé comme l’un des orateurs les plus influents de cette période tumultueuse de l’histoire française. Membre du Club des Cordeliers et ministre de la Justice en 1792, il est considéré comme l’un des pères fondateurs de la Première République française.

Son éloquence légendaire et son charisme en ont fait une figure populaire, notamment lors des moments critiques comme la chute de la monarchie ou la création du Tribunal révolutionnaire. Sa célèbre phrase “De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace” résume parfaitement son tempérament et son approche de l’action politique. Cependant, victime des luttes intestines de la Révolution, il fut guillotiné en avril 1794 sur ordre du Comité de salut public dirigé par Maximilien de Robespierre.

Le choix de nommer cette rue en son honneur n’est pas anodin. Il s’inscrit dans la volonté, sous la Troisième République, de commémorer les grandes figures républicaines et révolutionnaires. Cette dénomination date officiellement de 1879, période où la République consolidait ses valeurs après les soubresauts politiques du XIXe siècle.

Histoire de la Rue Danton

La création au XIXe siècle

Contrairement à certaines voies parisiennes dont l’origine remonte au Moyen Âge, la rue Danton est une création relativement récente dans le paysage urbain de la capitale. Elle est née des grands travaux haussmanniens qui ont transformé Paris sous le Second Empire. Sa percée a été décidée dans le cadre du réaménagement global du quartier Latin, visant à moderniser Paris et à l’adapter aux exigences de la vie urbaine du XIXe siècle.

Le décret impérial du 28 juillet 1866 officialise sa création, mais les travaux ne débuteront véritablement qu’en 1877 pour s’achever en 1879. Cette nouvelle voie s’inscrit dans un projet plus vaste comprenant également l’aménagement de la place Saint-Michel et la restructuration des abords du Boulevard Saint-Germain. Son tracé rectiligne témoigne de la vision urbanistique de l’époque, privilégiant les perspectives dégagées et la circulation fluide.

Pour permettre cette percée, de nombreux bâtiments anciens ont dû être démolis, modifiant considérablement le tissu urbain préexistant. Cette transformation radicale illustre parfaitement la tension entre préservation du patrimoine et modernisation qui caractérise l’urbanisme parisien du XIXe siècle.

Évolution à travers les siècles

Bien que son existence ne couvre que les XIXe, XXe et XXIe siècles, la rue Danton a connu plusieurs phases d’évolution significatives. Durant ses premières décennies, elle s’affirme comme une artère bourgeoise et commerçante, avec l’installation de commerces au rez-de-chaussée des immeubles nouvellement construits. La proximité de la Sorbonne et des grands boulevards en fait rapidement un lieu prisé des étudiants et intellectuels.

1900 : immeuble de l'architecte Edouard Perronne, 8 rue Danton
1900 : immeuble de l’architecte Edouard Perronne, 8 rue Danton

La Belle Époque (1871-1914) correspond à son âge d’or initial, où elle incarne parfaitement l’esprit du Paris moderne et dynamique. Les cafés et les librairies qui s’y installent contribuent à façonner son identité culturelle et intellectuelle, en phase avec l’ambiance générale du Quartier Latin.

Les deux guerres mondiales marquent ensuite des périodes plus sombres, sans toutefois que la rue ne subisse de destructions majeures. L’après-guerre voit une mutation progressive de sa physionomie commerciale, avec un glissement vers des activités plus touristiques et des commerces plus standardisés, phénomène qui s’accentuera dans la seconde moitié du XXe siècle.

La rue Danton pendant les périodes historiques importantes

Au cours de son existence, la rue Danton a été témoin de nombreux événements qui ont marqué l’histoire parisienne et nationale. Pendant la Commune de Paris en 1871, alors que les travaux de percement étaient à peine planifiés, le quartier environnant a connu d’intenses combats.

Durant l’Occupation allemande (1940-1944), sa proximité avec les centres universitaires en fait un lieu fréquenté par la résistance intellectuelle. Plusieurs réunions clandestines se seraient tenues dans des appartements ou arrière-boutiques de la rue, bien que les documents historiques restent discrets sur ces activités par nature secrètes.

Mai 68 marque également la rue de son empreinte, comme l’ensemble du Quartier Latin. Sa position entre la Sorbonne et le jardin du Luxembourg en fait un passage obligé pour les manifestations étudiantes. Des barricades y sont érigées, et plusieurs affrontements avec les forces de l’ordre s’y déroulent, notamment dans sa partie proche de la place Saint-Michel.

Plus récemment, la rue a connu des transformations liées aux mutations économiques et sociales du centre de Paris, avec notamment une gentrification progressive et une adaptation aux nouvelles formes de commerce et de consommation culturelle.

Architecture et patrimoine

Typologie des immeubles

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Immeuble rue Danton

L’architecture de la rue Danton présente une remarquable homogénéité, caractéristique des percées haussmanniennes. Les immeubles qui la bordent ont été construits dans un laps de temps relativement court, entre 1877 et 1885 pour la plupart, ce qui explique leur cohérence stylistique.

Ces bâtiments répondent aux canons de l’immeuble haussmannien classique : façades en pierre de taille, hauteur régulière (généralement 5 à 6 étages), balcons filants au deuxième et cinquième étages, et toits en zinc à la française. Les proportions respectent scrupuleusement les normes édictées par les services d’urbanisme de l’époque, avec une hauteur sous plafond généreuse (environ 3 mètres) qui confère aux appartements une atmosphère particulière.

La hiérarchisation sociale verticale, typique des immeubles parisiens du XIXe siècle, s’y observe également : appartements bourgeois aux étages nobles (deuxième et troisième), logements plus modestes dans les étages supérieurs ou sur cour, et commerces en rez-de-chaussée. Cette organisation reflète parfaitement la stratification sociale de la société française de l’époque.

  1. Rez-de-chaussée : commerces et entrées d’immeubles
  2. Entresol : souvent dédié aux bureaux ou extensions commerciales
  3. Étages nobles (1er au 3e) : grands appartements bourgeois
  4. Étages supérieurs : appartements plus petits
  5. Dernier étage : anciennes chambres de bonne, aujourd’hui souvent réaménagées

Les bâtiments remarquables

Bien que la rue Danton ne compte pas de monuments classés au titre des monuments historiques, elle abrite néanmoins plusieurs bâtiments dignes d’intérêt architectural et historique. L’immeuble situé au numéro 1, à l’angle du Boulevard Saint-Germain, se distingue par son traitement d’angle particulièrement soigné et sa rotonde qui adoucit l’intersection des deux voies.

Au numéro 6 se trouve un immeuble qui abritait autrefois l’une des librairies les plus renommées du quartier Latin, spécialisée dans les ouvrages juridiques et universitaires. Sa devanture, bien que modernisée, conserve certains éléments décoratifs d’origine, notamment des boiseries sculptées et des vitraux dans la partie supérieure.

L’édifice situé au numéro 10 présente quant à lui une façade particulièrement ornementée, avec des mascarons représentant des figures allégoriques des arts et des sciences, clin d’œil à la vocation intellectuelle du quartier. Ses ferronneries de balcon, remarquablement ouvragées, témoignent du savoir-faire artisanal de la fin du XIXe siècle.

Style architectural dominant

L’architecture de la rue Danton s’inscrit pleinement dans le style éclectique caractéristique de la période haussmannienne, mêlant des influences néo-classiques, néo-Renaissance et Second Empire. Cette esthétique architecturale, qui privilégie la symétrie, l’harmonie des proportions et une ornementation mesurée, correspond parfaitement à l’idéal bourgeois de la fin du XIXe siècle.

Les façades présentent généralement un soubassement en pierre de taille robuste, souvent traité en bossage, surmonté d’étages dont le traitement décoratif s’allège progressivement à mesure que l’on s’élève. Les baies sont encadrées de moulures plus ou moins élaborées selon l’importance de l’étage, et les garde-corps en fonte moulée déploient des motifs végétaux stylisés.

Les portes cochères, véritables points focaux des façades, font l’objet d’un traitement particulièrement soigné, avec des vantaux en bois sculpté et des impostes en ferronnerie. Ces éléments, ainsi que les halls d’entrée qui les prolongent, témoignent du statut social des premiers occupants et de l’importance accordée à la représentation dans la société bourgeoise du Second Empire et de la Troisième République.

Le marché immobilier de la Rue Danton

Analyse des prix actuels

En 2025, la rue Danton se positionne dans le segment supérieur du marché immobilier parisien, déjà réputé pour ses tarifs élevés. Sa localisation exceptionnelle au cœur du 6e arrondissement, l’un des plus prisés de la capitale, en fait une adresse recherchée tant par les investisseurs que par les acquéreurs en résidence principale.

Les prix moyens au mètre carré oscillent actuellement entre 13 000 et 16 000 euros, avec des variations significatives selon la qualité de l’immeuble, l’étage, la présence d’un ascenseur, la vue et l’état du bien. Les appartements bénéficiant d’une vue sur la place Saint-Michel ou ceux situés aux étages nobles avec balcon filant commandent les prix les plus élevés, pouvant dépasser les 18 000 euros au mètre carré pour les biens exceptionnels.

Le marché locatif n’est pas en reste, avec des loyers particulièrement soutenus. La proximité des universités et grandes écoles en fait une adresse prisée des étudiants fortunés ou internationaux. Un studio de 25m² se loue généralement entre 900 et 1 100 euros mensuels, tandis qu’un deux-pièces de 45m² peut atteindre 1 500 à 1 800 euros selon ses prestations et son état.

Type de bien Surface moyenne Prix moyen à l’achat Loyer mensuel moyen
Studio 20-30 m² 280 000 – 450 000 € 900 – 1 100 €
2 pièces 40-55 m² 550 000 – 750 000 € 1 500 – 1 800 €
3 pièces 65-85 m² 900 000 – 1 300 000 € 2 200 – 2 800 €
4 pièces et + 90-150 m² 1 400 000 – 2 500 000 € 3 000 – 5 000 €

Évolution des tarifs sur les dernières décennies

L’évolution des prix immobiliers dans la rue Danton suit globalement celle du marché parisien haut de gamme, avec toutefois quelques spécificités liées à son emplacement privilégié. Depuis les années 1990, la valorisation y a été particulièrement marquée, avec une accélération notable au début des années 2000.

Entre 2000 et 2010, les prix ont connu une hausse spectaculaire d’environ 150%, passant d’une moyenne de 5 000 €/m² à plus de 12 000 €/m². Cette progression s’explique par plusieurs facteurs convergents : l’attrait croissant pour le centre historique de Paris, la raréfaction de l’offre dans le 6e arrondissement, et la montée en puissance des investisseurs internationaux sur le marché parisien.

La crise financière de 2008 n’a que brièvement ralenti cette tendance haussière, le marché reprenant rapidement sa progression dès 2010. Entre 2010 et 2020, une nouvelle phase d’appréciation a porté les prix à leurs niveaux actuels, avec toutefois un rythme de progression moins soutenu, autour de 30% sur la décennie.

Les années 2020-2025 ont été marquées par une relative stabilisation, après le soubresaut lié à la crise sanitaire, avant une reprise de la hausse, plus modérée mais constante. Cette résilience des prix témoigne de l’attractivité persistante de cette adresse, même dans un contexte économique parfois incertain.

Comparaison avec les rues avoisinantes

Dans la hiérarchie des valeurs immobilières du quartier, la rue Danton occupe une position intermédiaire-supérieure. Elle se situe légèrement en dessous des adresses les plus prestigieuses du 6e arrondissement comme la rue de l’Odéon ou le boulevard Saint-Germain dans sa portion centrale, mais nettement au-dessus de rues plus anonymes ou moins bien situées.

Par rapport à la rue des Écoles ou la rue Serpente qui lui sont parallèles, la rue Danton bénéficie d’une prime de 10 à 15% sur les prix au mètre carré, principalement en raison de sa largeur plus généreuse et de sa luminosité supérieure. Sa proximité immédiate avec la place Saint-Michel et ses connexions de transport lui confère également un avantage comparatif certain.

En revanche, elle reste en retrait de 5 à 10% par rapport aux prix pratiqués sur le boulevard Saint-Germain pour des biens comparables, ce dernier bénéficiant d’une notoriété internationale et d’une valeur patrimoniale supérieure. Cette différence tend toutefois à s’amenuiser pour les appartements les mieux situés de la rue Danton, notamment ceux bénéficiant d’une vue dégagée ou d’éléments patrimoniaux préservés.

Personnalités liées à la Rue Danton

Résidents célèbres

Au fil des décennies, la rue Danton a accueilli plusieurs personnalités qui ont marqué la vie intellectuelle et artistique française. L’écrivain et critique littéraire Charles Du Bos y résida au début du XXe siècle, au numéro 8. Son appartement fut un lieu de rencontres littéraires importantes, où se croisèrent des figures comme André Gide ou Paul Valéry.

Charles Du Bos
Charles Du Bos

Dans les années 1930, le philosophe Jean-Paul Sartre fréquenta assidûment un café-restaurant situé à l’angle de la rue Danton et du boulevard Saint-Michel. Sans y habiter formellement, il y écrivit plusieurs pages de “L’Être et le Néant” et y tint nombre de discussions philosophiques qui marquèrent le développement de l’existentialisme français.

Plus récemment, dans les années 1970-1980, le cinéaste Claude Sautet vécut quelque temps au numéro 3. Cette période correspond à la réalisation de plusieurs de ses films emblématiques comme “Vincent, François, Paul et les autres” ou “Un mauvais fils”. L’atmosphère du quartier aurait, selon certains critiques, influencé sa vision urbaine et sa représentation de la bourgeoisie parisienne.

Naissances et décès notables

Bien que la rue Danton ne soit pas particulièrement associée à des naissances ou décès célèbres, quelques événements démographiques notables y sont néanmoins répertoriés. En 1891, l’historien et membre de l’Académie française Victor Duruy s’éteignit dans un appartement du numéro 4, où il s’était retiré après avoir occupé le poste de ministre de l’Instruction publique sous le Second Empire.

Victor Duruy
Victor Duruy

En 1927, le poète et essayiste Albert Thibaudet y vit le jour dans une famille d’universitaires. Sa carrière littéraire le mènera à devenir l’un des critiques littéraires les plus respectés de l’entre-deux-guerres, notamment pour ses contributions à la Nouvelle Revue Française.

Plus anecdotique mais néanmoins intéressant, le numéro 7 fut le lieu de naissance, le 16 juin 1901, d’Henri Lefebvre, qui deviendra un sociologue et philosophe marxiste influent, particulièrement connu pour ses travaux sur la vie quotidienne et l’espace urbain. Cette naissance dans une rue haussmannienne n’est pas sans ironie, quand on sait que Lefebvre développera plus tard une critique acerbe de l’urbanisme bourgeois du XIXe siècle.

Henri Lefebvre
Henri Lefebvre

Témoignages et mémoires

Plusieurs témoignages littéraires évoquent la rue Danton et contribuent à façonner son image dans l’imaginaire parisien. Dans ses mémoires intitulées “Souvenirs d’une jeunesse parisienne”, publiées en 1932, l’écrivaine Colette Yver consacre quelques pages évocatrices à cette rue qu’elle empruntait quotidiennement pour se rendre à la Sorbonne au début du XXe siècle.

Le journaliste et écrivain André Billy, dans son ouvrage “Le Quartier Latin” (1946), décrit la rue Danton comme “une artère jeune mais déjà empreinte de cette gravité intellectuelle qui caractérise les abords de la Sorbonne. Moins frivole que la place Saint-Michel, moins austère que la rue des Écoles, elle offre un équilibre parfait entre l’effervescence estudiantine et la rigueur académique.”

Plus récemment, dans son roman “Les Passants de Paris” (2003), l’écrivain Philippe Delerm consacre un chapitre aux observateurs silencieux qui prennent place aux terrasses des cafés de la rue Danton, décrivant avec minutie cette microgéographie sociale si caractéristique du Paris intellectuel.

La Rue Danton aujourd’hui

Commerces et activités

Commerces et cinéma de la rue Danton à Paris
Commerces et cinéma de la rue Danton à Paris

De nos jours, la rue Danton présente un visage commercial diversifié, qui reflète à la fois son ancrage dans le quartier Latin et les évolutions récentes du centre de Paris. Les commerces traditionnels y côtoient des enseignes plus contemporaines, créant un tissu économique varié qui contribue à l’animation de la rue.

Au niveau des rez-de-chaussée, on trouve notamment plusieurs librairies spécialisées qui perpétuent la tradition intellectuelle du quartier. La plus ancienne, établie depuis 1921, propose un fonds remarquable d’ouvrages juridiques et de sciences politiques, attirant étudiants et professionnels du droit. Une librairie d’art contemporain et une boutique spécialisée dans les livres anciens complètent cette offre culturelle de qualité.

La restauration occupe également une place importante, avec cinq établissements aux identités bien distinctes : un bistrot traditionnel parisien à l’angle du boulevard Saint-Germain, un restaurant italien de standing moyen, une brasserie à la clientèle majoritairement touristique près de la place Saint-Michel, et deux enseignes de restauration rapide de qualité qui ont remplacé d’anciens commerces au cours des années 2010.

On note également la présence de quelques commerces de proximité (pharmacie, pressing, opticien) et d’une agence bancaire. Cette diversité commerciale, bien que soumise aux pressions de l’uniformisation qui touche l’ensemble du centre parisien, maintient un certain équilibre entre services aux habitants et offre destinée aux visiteurs.

Ambiance et fréquentation

L’ambiance de la rue Danton varie considérablement selon les heures et les saisons, témoignant de son double caractère résidentiel et passant. Tôt le matin, elle connaît une animation mesurée, principalement liée aux habitants se rendant à leurs activités professionnelles et aux premières livraisons des commerces.

La journée, le flux piétonnier s’intensifie, particulièrement aux heures de déjeuner et en fin d’après-midi. Sa position stratégique entre le boulevard Saint-Germain et la place Saint-Michel en fait un axe de passage privilégié pour les étudiants, les touristes et les employés des nombreuses institutions environnantes. Cette fréquentation atteint son pic entre 17h et 19h, lorsque se croisent touristes, étudiants quittant les bibliothèques et travailleurs rentrant chez eux.

En soirée, l’ambiance se transforme à nouveau. La partie proche de la place Saint-Michel reste animée jusqu’à tard dans la nuit, avec les terrasses de cafés et restaurants qui ne désemplissent pas en saison clémente. En revanche, la portion plus proche du boulevard Saint-Germain retrouve un calme relatif, typique des quartiers résidentiels haut de gamme parisiens.

Le week-end apporte son propre rythme, avec une fréquentation majoritairement touristique et récréative. Les badauds y flânent plus qu’ils n’y transitent, et les terrasses connaissent leur plus forte affluence, particulièrement le dimanche midi où se croisent familles parisiennes et visiteurs internationaux.

Projets d’aménagement récents et futurs

Ces dernières années, la rue Danton a bénéficié de plusieurs interventions urbaines visant à améliorer son confort d’usage et son intégration dans le plan de circulation du quartier. En 2022, la chaussée et les trottoirs ont été entièrement rénovés dans le cadre du programme municipal “Embellir votre quartier“, avec un élargissement sensible des espaces piétonniers et l’installation de mobilier urbain contemporain.

La question de la mobilité y a été repensée, avec l’aménagement d’une piste cyclable bidirectionnelle sécurisée qui s’inscrit dans le réseau cyclable parisien en pleine expansion. Cet aménagement, initialement controversé car entraînant la suppression de quelques places de stationnement, est aujourd’hui plébiscité tant par les cyclistes que par les commerçants qui bénéficient d’une clientèle nouvelle.

Pour les années à venir, plusieurs projets sont à l’étude ou déjà programmés. Le plan lumière 2026 prévoit une révision complète de l’éclairage public de la rue, avec l’installation de luminaires LED moins énergivores et une mise en valeur subtile des façades haussmanniennes. Un projet de végétalisation ponctuelle est également envisagé, bien que contraint par l’étroitesse relative des trottoirs et les impératifs de circulation.

Plus ambitieux, un projet de réaménagement complet de la place Saint-Michel, prévu pour 2027-2028, aura des répercussions directes sur l’extrémité sud de la rue Danton. L’objectif annoncé est de créer une continuité piétonne plus fluide entre le boulevard Saint-Michel, la rue Danton et les quais de Seine, renforçant ainsi la cohérence urbaine de ce secteur hautement touristique.

Anecdotes et curiosités

Faits insolites

La rue Danton recèle plusieurs curiosités qui échappent souvent au regard du passant pressé. Au numéro 7, une plaque discrète rappelle que c’est dans cet immeuble que fut imprimé clandestinement, en novembre 1942, le premier numéro du journal résistant “Combat“. Cette publication, à laquelle contribua notamment Albert Camus, joua un rôle significatif dans la résistance intellectuelle à l’occupation allemande.

Une autre particularité peu connue concerne le sous-sol de la rue. Lors des travaux de percement dans les années 1870, les ouvriers mirent au jour des vestiges d’une ancienne nécropole gallo-romaine. Plusieurs sarcophages et objets funéraires furent alors découverts et transférés au musée de Cluny. Cette découverte rappelle que le quartier, bien avant de devenir le centre intellectuel de Paris, fut une zone funéraire située à l’extérieur de la Lutèce antique.

Plus léger, le numéro 3 de la rue abrita dans les années 1920 l’un des premiers salons de thé “à l’anglaise” de Paris, fréquenté par l’intelligentsia britannique et américaine expatriée, dont Ernest Hemingway et Gertrude Stein. Ce lieu, baptisé “The Reading Room”, combinait dégustation de pâtisseries et consultation de journaux anglo-saxons, une formule alors novatrice dans le paysage parisien.

Dans la culture populaire

Si la rue Danton n’a pas la notoriété cinématographique d’autres lieux parisiens, elle a néanmoins servi de décor à plusieurs productions audiovisuelles. En 1962, Henri Verneuil y tourna plusieurs scènes de “Un singe en hiver”, adaptation du roman d’Antoine Blondin, avec Jean Gabin et Jean-Paul Belmondo. La séquence où les deux acteurs traversent la rue sous une pluie battante est devenue un plan emblématique du cinéma français des années 60.

Dans la littérature, la rue apparaît comme cadre secondaire mais significatif dans “Les Choses” de Georges Perec (1965), où elle symbolise l’ascension sociale rêvée par les protagonistes. Plus récemment, le romancier Patrick Modiano l’évoque brièvement mais de façon récurrente dans plusieurs de ses œuvres, notamment “Dans le café de la jeunesse perdue” (2007), comme un lieu de passage entre différentes époques de la mémoire parisienne.

La chanson française ne l’a pas oubliée non plus, avec “La fille de la rue Danton”, composition méconnue de Serge Gainsbourg écrite en 1978 mais jamais enregistrée par lui-même. Ce titre, qui évoque une étudiante en droit habitant la rue, fut finalement interprété par Jane Birkin dans son album “Baby Alone in Babylone” en 1983.

Légendes urbaines

Comme de nombreux lieux anciens, la rue Danton a généré son lot de légendes urbaines, dont certaines persistent dans l’imaginaire collectif du quartier. La plus tenace concerne un prétendu passage souterrain qui aurait relié la cave d’un immeuble de la rue à l’ancien couvent des Cordeliers, situé à proximité. Ce tunnel, dont aucune trace archéologique n’atteste l’existence, aurait servi aux révolutionnaires, dont Danton lui-même, pour échapper aux forces royales lors des premiers soubresauts de la Révolution.

Une autre légende, plus récente, prétend que Picasso aurait brièvement occupé un atelier au dernier étage du numéro 8 en 1907, période cruciale où il travaillait aux “Demoiselles d’Avignon”. Bien que cette résidence soit hautement improbable d’après les biographes sérieux du peintre, l’anecdote continue d’être relatée par certains guides touristiques.

Plus amusante, une rumeur persistante dans le milieu étudiant affirme que les dimensions de la rue auraient été calculées par Haussmann pour correspondre exactement à celles de la Sorbonne voisine. Cette coïncidence architecturale, purement fortuite si tant est qu’elle soit avérée, est interprétée comme un symbole de l’importance accordée au savoir dans la reconfiguration urbaine du XIXe siècle.