On pensait avoir tout dit sur le Titanic, et pourtant, plus d’un siècle après la nuit du 14 avril 1912, la légende revient hanter les salles d’enchères. Fin avril 2024, un petit cliché noir-et-blanc, à peine plus grand qu’une carte postale, fait surface chez un commissaire-priseur britannique. Sur la légende, une faute d’orthographe savoureuse : « Titantic ». Pas de quoi décourager les sceptiques, mais assez pour relancer la question : et si cette photographie montrait bel et bien le meurtrier de 1 500 âmes ?
Un bloc de glace qui refuse de couler dans l’oubli
Décrire l’iceberg du Titanic, c’est un peu dresser le portrait d’un fantôme : on sait qu’il mesurait environ 17 m de haut, 125 m de long et pesait 1,5 million de tonnes – des estimations reprises par la Marine américaine et l’International Ice Patrol. Pour le reste, il s’est volatilisé dans l’histoire, laissant la place à trois clichés rivaux. Le nouveau venu brouille les cartes, comme un témoin surprise arrivé très (très) en retard au procès.
Un « bateau-morgue » au milieu des glaces
Le tirage aurait été pris le 16 avril 1912 à bord du CS MacKay-Bennett, câbleur britannique transformé en navire de récupération par la White Star Line. Sa mission : repêcher les victimes dans l’Atlantique Nord. Faute d’espace et de fluides d’embaumement, 116 corps furent finalement confiés à la mer. Au milieu de cette sombre besogne, un membre de la firme John R. Snow and Co. immortalise un iceberg solitaire et griffonne « Titantic » sous la photo – indice ou hasard ? Impossible à trancher.
L’arène des enchères, nouvelle salle des machines
Présenté par Henry Aldridge & Son le 27 avril 2024, le cliché est estimé entre 4 600 € et 8 050 €. Ce n’est pas un record : en 2015, une autre photographie supposée montrer le fameux bloc était partie pour 27 000 €. Menus originaux, clés de cabine ou violon de l’orchestre : chaque objet nourrit un commerce où l’émotion se mêle à la légalité. L’UNESCO rappelle d’ailleurs que le site du Titanic est protégé, « sépulcre maritime » oblige.
Une enquête toujours à flot
Peut-on confirmer qu’il s’agit du bon iceberg ? Les glaciologues de l’Université de Cambridge restent prudents. Entre la collision et le cliché, le bloc a pu dériver sur plusieurs kilomètres. La fameuse strie rouge – trace supposée de la coque – n’apparaît sur aucune image connue. Et l’iceberg, évidemment, a fondu depuis longtemps.
Reste que, même à l’ère des satellites, un simple bloc de glace peut mettre à mal la technologie la plus avancée. Chaque nouveau fragment d’histoire rappelle la fragilité de nos certitudes… tout en maintenant le mythe du Titanic à flot.