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Paradoxe : définition · synonymes · exemples

Publié le 05/09/2017 (m.à.j* le 24/01/2024)
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Définition. 

(Nom masculin). Le paradoxe signifie : idée contraire à l’opinion commune, idée qui ne semble pas vraisemblable. En effet, ce terme vient du grec paradoxos, παραδοξος, formé à partir de :

  • para : « contre »;
  • doxa : « opinion ».

Exemple : « L’homme n’est ni ange, ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait la bête. » (Pascal, Pensées, 572). Ce célèbre aphorisme, qui associe dans une antithèse les termes « ange » et « bête », est un paradoxe : on pense spontanément que celui qui fait l’ange, c’est-à-dire celui qui fait l’effort de bien se comporter, est une personne bonne. Cependant, Pascal nous dit que lorsque l’on fait l’ange, on finit toujours par développer des comportements mauvais. En réalité, seul Dieu est parfait : l’homme n’est qu’un pécheur moyen, ni complètement bon, ni complètement mauvais. 

Un paradoxe est une figure de style dans la mesure où des idées ou des mots ordinairement opposés sont rassemblés d’une manière originale. Ces associations surprenantes frappent l’esprit. 

Autre exemple : « Heureux les pauvres en esprit, car le Royaume des Cieux est à eux. » (Matthieu 5 : 3, Traduction Bible de Jérusalem). Cette sentence tirée des Béatitudes paraît de prime abord paradoxale. En effet, les propositions apparemment contradictoire « Heureux » et « les pauvres en esprit » (c’est-à-dire les pauvres, les humbles) sont ici associées. Jésus renverse en effet l’ordre établi : c’est aux humbles, aux pauvres, que revient le Royaume des Cieux, alors que la Terre est dominée par les riches et les puissants. 

Le paradoxe, une figure de l’opposition

Le paradoxe déroute puisqu’il choque l’opinion admise. Derrière lui se cache une intention provocatrice, celle de choquer, de heurter le sens commun. Par là, le paradoxe invite ou force à la réflexion (souvent morale). Le paradoxe est un procédé rhétorique efficace qui permet à l’orateur de s’imposer à son auditoire en adoptant une posture non-conformiste. Celui qui l’énonce remplit le rôle de celui qui fait réfléchir au-delà des idées reçues, il surprend, il révèle ce qui était jusque là inconnu.

Paradoxe et antilogie

Lorsqu’un paradoxe est volontairement faux, on peut parler d’antilogie, c’est-à-dire une contradiction entre plusieurs idées dans d’un même discours.

On ne montre que ce qui n’est pas sûr, pour inspirer confiance.

Jarry, La Chandelle verte

Étymologie de paradoxe

Paradoxe vient du grec paradoxos, παραδοξος, « contraire à l’attente ou à l’opinion commune, extraordinaire », à propos 

  • para : « contre » ;
  • doxa, δόξα: « opinion », et en philosophie, croyance philosophique opposée à la vérité pure.

Synonymes

Bizzarrie, invraisemblance, contradiction, sophisme, etc.

Exemples de paradoxes

Nul n’est méchant volontairement.

Socrate

Ainsi les derniers seront les premiers, et les premiers seront les derniers.

Matthieu, 20:16

Nous proclamons la mort du Seigneur

Paul de Tarse et formule courante dans le rite de l’Église catholique

Proclamer la mort du Seigneur est paradoxal pour ceux qui ont foi en lui. En réalité, la mort de Jésus annonce sa résurrection. 

C’est puer que de sentir bon

Montaigne, Essais, LV, Des senteurs

À l’époque de Montaigne, on met du parfum pour masquer les mauvaises odeurs corporelles.

Adieu : je vais chercher au milieu des combats
Cette immortalité que donne un beau trépas.

Corneille, Polyeucte, II, 2, Sévère

La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique.

Pascal, Pensées, 103

La nature a des perfections pour montrer qu’elle est l’image de Dieu, et des défauts pour montrer qu’elle n’en est que l’image.

Le pénible fardeau de n’avoir rien à faire

Boileau, Épître, XI, 86

Le paradoxe, comme on peut le lire ici, peut revêtir une dimension ironique (quel fardeau de n’avoir rien à faire !) mais aussi morale : c’est un fardeau, en effet, de ne pas trouver sa place dans le monde. 

Lecteurs vulgaires, pardonnez-moi mes paradoxes : il faut en faire quand on réfléchit ; et quoi que vous puissiez dire, j’aime mieux être homme à paradoxes qu’homme à préjugés.

Rousseau, L’Émile, Livre II

La mélancolie, c’est le bonheur d’être triste.

Hugo, Les Travailleurs de la mer, Nuit et Lune

La propriété, c’est le vol.

Proudhon, Qu’est-ce que la propriété ? 

Ce qu’il y a de plus profond dans l’homme, c’est la peau.

Paul Valéry, Idée fixe ou Deux hommes à la mer

Pour une explication de cette citation, cliquez ici.

Les crimes engendrent d’immenses bienfaits et les plus grandes vertus développent des conséquences funestes.

Dialogues

Les hommes souvent veulent aimer, et ne sauraient y réussir ; ils cherchent leur défaite sans pouvoir la rencontrer ; et si j’ose ainsi parler, ils sont contraints de demeurer libres.

La Bruyère, Les Caractères, IV, 16

L’on parle impétueusement dans les entretiens, souvent par vanité ou par humeur, rarement avec assez d’attention : tout occupé du désir de répondre à ce qu’on n’écoute point, l’on suit ses idées, et on les explique sans le moindre égard pour les raisonnements d’autrui.

V, 67

L’impossibilité où je suis de prouver que Dieu n’est pas, me découvre son existence.

 XVII, 13

On est quelquefois aussi différent de soi-même que des autres.

La Rochefoucauld, Maximes, 135

L’homme est né libre et partout il est dans les fers.

Rousseau, Du Contrat social

La douceur qui fascine et le plaisir qui tue

Baudelaire, Fleurs du mal, À une passante

Ô Dieu, que la guerre est jolie !

Apollinaire, L’adieu du cavalier 

La guerre, c’est la paix, la liberté c’est l’esclavage, l’ignorance c’est la force.

Orwell, 1984

Le paradoxe que l’on trouve dans ce slogan sert le régime totalitaire décrit par Orwell. Le totalitarisme cherche à faire croire aux pires absurdités.