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Chiasme : définition · exemples · analyse (figure de style)

Publié le 12/06/2017 (m.à.j* le 23/10/2024)
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Définition

Le chiasme (se prononce kiasme) est une figure de style qui consiste à disposer au moins 2 éléments, par exemple l’adjectif + le nom rude journée, en miroir avec au moins deux autres éléments correspondants, par exemple le nom + l’adjectif travail fructueux. On obtient ainsi une phrase formée sur le modèle AB/BAà rude journée, travail fructueux. Les deux parties d’un chiasme sont souvent séparées par une conjonction de coordination (mais, ou, et, donc, or, ni, car) ou par un point virgule ou une virgule. Exemple :

Un roi chantait en bas, en haut mourait un Dieu.

Hugo, La légende des siècles, Booz endormi (La Légende des siècles, Booz endormi)

Ce vers de Hugo est un chiasme formé comme suit :

  • ABC = nom (roi) + verbe (chantait) + adverbe (en bas) /
  • CBA = adverbe (en haut) + verbe (mourait) + nom (Dieu).

C’est donc un chiasme multiple sous forme ABC / CBA. Le chiasme donne ici de l’harmonie à l’expression : la sonorité de la phrase devient agréable. Il donne du rythme dans une structure du texte resserrée. En outre, le chiasme permet de mettre en relief une ressemblance ou une opposition.

Attention : une phrase formée sur le modèle AB/AB n’est pas un chiasme mais un parallélisme. Par exemple : « Je meurs si (A) je vous perds (B) ; mais je meurs si (A) j’attends (B). » (Racine, Andromaque)

Autre exemple

Et osent les vaincus les vainqueurs desdaigner.

Du Bellay, Les Antiquité de Rome, XIV (Les Antiquités de Rome)

Un chiasme ne joue pas uniquement avec les différentes classes grammaticales : nom, verbe, adjectifs, adverbes, etc. Il peut aussi jouer sur les champs sémantiques. Les deux noms de ce vers, vaincus et vainqueurs, sont deux dérivés du verbe vaincre. Les deux verbes, oser et desdaigner (dédaigner), appartiennent à des champs sémantiques opposés. On a donc ici un chiasme grammatical doublé d’un chiasme sémantique.

Vous trouverez en cliquant ici la liste de toutes les figures de style essentielles de la langue française

 

Chiasme et antithèse

L’antithèse est une figure de style qui consiste à rapprocher des termes ou des idées opposées. Elle se marie donc bien avec le chiasme. On le voit avec la citation de Du Bellay : « Et osent les vaincus les vainqueurs desdaigner ». Vaincus et vainqueurs sont antithétiques, tout comme oser et desdaigner.

 

Chiasme et antimétabole ou réversion

L’antimétabole est un type de chiasme dans lequel on utilise les mêmes éléments, dans un ordre inversé, dans le même discours et avec un sens différent. Exemple :

Il faut manger pour vivre, et non pas vivre pour manger.

Autre exempleBonnet blanc et blanc bonnet.

 

Plusieurs types de chiasmes

  • le chiasme sémantique : il repose sur des idées ;
  • le chiasme grammatical : il repose sur des mots ayants la même nature grammaticale ;
  • le chiasme phonique : il repose sur des harmonies sonores. Exemple : « Je préfère les assauts des pique-assiettes aux assiettes de Picasso.

 

Ancienne définition de chiasme

Un chiasme était un signe que l’on écrivait en marge d’un passage pour marquer une désapprobation. Il se présentait sous la forme de la lettre grecque χ (khi).

 

Étymologie de chiasme

Chiasme vient du grec khiasmos (χιασμος) qui signifie « disposition en croix ».

 

Exemples de chiasmes

  • Je vous le dis: ce dernier descendit chez lui justifié, l’autre non. Car tout homme qui s’élève sera abaissé, mais celui qui s’abaisse sera élevé. (Bible de Jérusalem, Luc 18 : 14 [Bible de Jérusalem])
  • Ce n’est point parce qu’il est difficile que nous n’osons pas ; c’est parce que nous n’osons pas, qu’il est difficile.
  • Non quia difficilia sunt non audemus, sed quia non audemus difficilia sunt (Sénèque, Lettres à Lucilius, Lettre 104)
  • Joyeux la nuit, le jour triste je suis.
    J’ay en dormant ce, qu’en veillant poursuis (Du Bellay, L’Olive, XXVIII)
  • Qui craint de souffrir, il souffre desjà de ce qu’il craint. (Montaigne, Essais, Livre III, Chapitre 13)
  • Ayant le feu pour père, et pour mère la cendre. (D’Aubigné, Les Tragiques, VII, 519)
  • Mais elle était du monde, où les plus belles choses
    Ont le pire destin,
    Et rose elle a vécu ce que vivent les roses,
    L’espace d’un matin. (Malherbe, Consolation à Du Périer)
  • Vous êtes aujourd’hui ce qu’autrefois je fus. (Corneille, Le Cid, I, 3, Diègue)
  • En cet affront mon père est l’offensé,
    Et l’offenseur le père de Chimène ! (Le Cid, I, 6, Rodrigue)
  • On passe souvent de l’amour à l’ambition, mais on ne revient guère de l’ambition à l’amour. (François de La Rochefoucauld (1613 – 1680), Maximes, 490)
  • on veut haïr et on veut aimer, mais on aime encore quand on hait, et on hait encore quand on aime ; (Maximes, Réflexions diverses, VIII)
  • Ils ne mourraient pas tous, mais tous étaient frappés (La Fontaine, Fables, Les animaux malades de la peste)
    • La disposition est ici : verbe (mourraient) / pronom / pronom / verbe
  • J’aime mieux un vice commode
    Qu’une fatigante vertu. (Molière, AmphitryonII, 1, Mercure
  • Immoler Troie aux Grecs, au fils d’Hector la Grèce ? (Andromaque, IV, 5, Hermione
    • Ici : COD (Troie) / COI (aux Grecs) / COI (au fils d’Hector) / COD (la Grèce).
  • Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera. (Racine, Les PlaideursI, 1, Petit Jean)

Jacques.
Mais si vous êtes et si vous avez toujours été le maître de vouloir, que ne voulez-vous à présent aimer une guenon ; et que n’avez-vous cessé d’aimer Agathe toutes les fois que vous l’avez voulu ? Mon maître, on passe les trois quarts de sa vie à vouloir, sans faire.

Le maître.
Il est vrai.

Jacques.
Et à faire sans vouloir.

Diderot, Jaques le fataliste et son maître (Jacques le fataliste et son maître)

  • Il regarde longtemps, longtemps cherche sans voir. (Vigny, Les Destinées, Le Mont des Oliviers)
  • Ces murs maudits par Dieu, par Satan profanés, (Hugo, Odes et Ballades, À un passant)
    • Ici : participe passé (maudits) / complément d’agent (par Dieu) / participe passé (par Satan) / profanés (profanés).
  • La beauté sur les fronts, dans les cœurs la pensée, (Hugo, Les Contemplations, II, Melancholia)
  • Je ne songeais pas à Rose ;
    Rose au bois vint avec moi ; (Hugo, Les Contemplations, XIX, Vieille chanson du jeune temps)
  • Et l’on voit de la flamme aux yeux des jeunes gens,
    Mais dans l’œil du vieillard on voit de la lumière. (Hugo, La Légende des siècles, Booz endormi)
  • Elle à demi vivante et moi mort à demi. (Booz endormi)
  • La neige fait au Nord ce qu’au Sud fait le sable ; (Hugo, La Légende des siècles, Les Trois Cents, L’Asie)
  • Et ce champ me faisait un effet singulier,
    Des cadavres dessous et dessus des fantômes.
    Quelques hameaux flambaient ; au loin brûlaient des chaumes. (Hugo, La Légende des siècles, Le cimetière d’Eylau)
  • Ce n’est pas la conscience qui détermine la vie, mais la vie qui détermine la conscience.
    Nicht das Bewußtsein bestimmt das Leben, sondern das Leben bestimmt das Bewußtsein. (Karl Marx et Friedrich Engels, L’Idéologie allemande)
  • Ah ! que le monde est grand à la clarté des lampes !
    Aux yeux du souvenir que le monde est petit ! (Baudelaire, Les Fleurs du mal, CLI, Le Voyage)
  • Car j’ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
    Ô toi que j’eusse aimée, ô toi qui le savais ! (Les Fleurs du mal, CXVII, À une passante)
  • Et mon pied peureux froisse, au bord du marécage,
    Des crapauds imprévus et de froids limaçons (Baudelaire, Les ÉpavesLe Coucher du Soleil Romantique 
  • Mais voilà que la douce réalité des premiers jours allait devenir la réalité quotidienne qui fermait la porte aux espoirs indéfinis, aux charmantes inquiétudes de l’inconnu. (Maupassant, Une vieChapitre VI)
  • Je jouais avec Juliette et avec lui; avec Alissa, je causais. (Gide, La Porte étroite)
  • J’ai appris qu’une vie ne vaut rien, mais que rien ne vaut une vie. (Malraux, Les Conquérants)
  • Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays.
    And so, my fellow Americans: ask not what your country can do for you; ask what you can do for your country. (J.F. Kennedy, Discours inaugural)
  • L’humanité doit mettre fin à la guerre, ou la guerre mettra fin à l’humanité.
    Mankind must put an end to war – or war will put an end to mankind. (J.F. Kennedy, Address at U.N. General Assembly, 25 September 1961)