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« En sueur » ou « en sueurs » ? orthographe

Publié le 03/10/2022
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On écrit en général : « en sueur » (qui transpire beaucoup), qu’il y ait une seule ou plusieurs personnes. La préposition « en » introduit un complément circonstanciel de manière, qui informe sur l’état de physique d’une ou de plusieurs personnes. On dit « elle est arrivée tout en sueur » comme on pourrait dire, de manière moins naturelle, « elle était en état de sueur ». La sueur ne désigne pas ici chaque gouttelette de transpiration qui surgit à la surface de la peau de quelqu’un qui a chaud, qui est malade, qui a fait du sport, etc., mais l’ensemble du liquide. Cela ne correspond à pas l’usage de « sueur » au pluriel, qui permet de désigner, dans un langage littéraire, les peines que l’on se se donne pour accomplir une tâche (« après bien des sueurs, nous avons achevé notre travail »), et qui entre aussi dans des expressions figées, « avoir/donner des sueurs froides », qui signifie « causer une vive inquiétude », ou « sueurs nocturnes » (une transpiration excessive qui se manifeste pendant la nuit). On pourrait toutefois écrire « en sueurs froides » (comme Valéry dans ses Charmes, mais l’usage est rare). Exemples :

  • À cause de la canicule, je suis en sueur à la seconde même où je pénètre dans la rue.
  • J’étais encore loin d’aller bien. Pour un rien j’étais en sueur et pour un rien je prenais froid […] (Gide, L’Immoraliste)
  • Ce fut une quinte terrible qui lui déchirait la gorge ; et, la face rouge, le front en sueur, il étouffait dans sa serviette. (Maupassant, Bel-Ami)

L’usage du pluriel « en sueurs » est très rare. On peut le constater, par exemple, avec Google Ngram, ou par le très faible nombre de résultats présentés par Gallica, (559 pour le pluriel, plus de 15 500 pour le singulier). Toutefois, on en trouve des occurrences dans la littérature.

  • Maintenant, le ventre s’est aplati ; seulement, elle n’existe plus, elle n’a plus de jambes, tant elle est maigre ; et elle s’en va en sueurs continuelles… (Zola, Lourdes)
    • Zola semble employer le pluriel pour souligner le fait que son personnage connaît plusieurs crises de sueurs qui se succèdent.
  • Qui sur nos fronts pâlis tord ses bras en sueurs […] (Baudelaire, Œuvres posthumes)
    • Parce qu’il y a deux bras ?