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« Tout entière » ou « toute entière » ? Orthographe

Publié le 13/10/2021 (m.à.j* le 22/07/2024)
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Orthographe

On écrit : tout entière. Ici, la liaison entre les deux termes peut induire en erreur : l’orthographe et la forme fautive se prononcent de la même manière. Exemples :

  • Cette belle région était offerte tout entière à ma peinture, que je pouvais exercer librement.
  • L’âme est laissée tout entière à elle-même, et l’attention est ramenée forcément à cet ouvrage du peuple-roi qu’on a sous les yeux.  (Stendhal, Mémoires d’un touriste)
  • Pendant quelques minutes, elle resta là, éperdue, dans cette crise qui la tenait tout entière. (Zola, Une Page d’amour)
  • Les photographes de presse saisissent la scène au vol, à un moment où Angela Merkel a stupéfié l’Allemagne et l’Europe tout entière en ouvrant les frontières allemandes pour accueillir les réfugiés bloqués en Europe centrale. (Lesechos.fr)

Cette locution sert aussi de titre pour un poème de Baudelaire (1821 – 1867) dans Les Fleurs du mal (1861).

Pourquoi l’orthographe est-elle « tout entière » ?

En effet, « tout » est ici employé comme adverbe (il signifie ici « complètement », « entièrement », « tout à fait»). Or, les adverbes ne varient que devant un adjectif au féminin qui commence par une consonne (toute bête, toute ronde) ou un h aspiré (un « h » qui ne permet pas la liaison, par exemple « toute honteuse », « toute hâlée » ou « toute hérissée »). Ce n’est pas le cas d’« entière » qui débute bien sûr par une voyelle. Il faut donc écrire « tout ».

La règle est la même, par exemple, pour « tout énervée », « tout essoufflée », « tout occupée », etc. Il faut remarquer toutefois que cette règle a été adoptée par l’Académie français au XIXe siècle, et qu’elle a été très souvent transgressée, même au XXe siècle. On trouve ainsi dans la Vie des Martyrs (1914 – 1916) de Georges Duhamel (1884 – 1966): 

Mais cette souffrance-là veut être soufferte toute entière ; elle n’étourdit même pas ceux qu’elle accable.

Même la 5e édition du Dictionnaire de l’Académie (1798) écrivait « Attendre une heure toute entière » (article « entier »). Cette mention disparaît dans la 6e édition (1835), mais revient à la 7e (1878) à l’article « tout ».

 À lire en cliquant ici : « le haricot » ou « l’haricot » ?