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De Gaulle : « La réforme, oui, la chienlit, non »

Publié le 20/01/2022
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« La réforme, oui, la chienlit, non » est une phrase rapportée de Charles de Gaulle (1890 – 1970), alors président de la République (depuis 1959), en réaction aux manifestations et troubles étudiants de mai 1968. Elle est prononcée le 18 ou le 19 mai 1968.

 

« La réforme, oui, la chienlit, non » : contexte (mai 1968)


L’agitation étudiante avait commencé dès le 2 mai à l’université de Nanterre. Le 3 mai, elle se propage à la Sorbonne, sur fond d’affrontement entre étudiants (extrême-gauche, gauche, droite et d’extrême-droite). Le recteur de l’académie de Paris, Jean Roche, fait évacuer l’université en faisant intervenir la police. Des affrontements avec la police se poursuivent dans le Quartier latin. Des barricades sont installées.

La crise se poursuit, provoquées par des facteurs complexes, augmentation du nombre d’étudiant, transformation de la culture individuelle et de l’attente sociale des plus jeunes, lassitude envers le pouvoir de De Gaulle, etc.

Le mouvement s’étend à la province. Le 13 mai, les syndicats appellent à la grève générale et un million de personnes manifestent. Les étudiants occupent la Sorbonne.

La crise continue, mais le président de la République part en voyage officiel en Roumanie le 14 mai. L’usine Sud-Aviation de Bouguenais est occupée, les métallurigstes de Woippy se mettent grève, le théâtre de l’Odéon et l’école des Beaux-Arts sont occupés, etc.

De Gaulle ne revient que le 18. 

Le 19, après une entrevue avec le président, le Premier ministre, Georges Pompidou, rapporte le célèbre mots aux journalistes présents sur le perron de l’Élysée

– Monsieur le Premier Ministre, le président de la République s’adressera-t-il aujourd’hui à la nation ? 

– Je ne pense pas, n’est-ce pas, mais si je puis vous résumer l’opinion du président de la République, c’est « la réforme, oui, la chienlit, non ». 

JT de 20H

Le Premier Ministre s’amuse à répéter ce « bon mot ». L’intention était probablement de marquer l’opinion. Le mot « chienlit » est un terme rare, voire inconnu, et dont on devine facilement la vulgarité. Ceci garantissait un grand retentissement au mot présidentiel. 

« Chienlit » est une agrégation de « chie », « en » et « lit », en d’autres termes, « celui qui chie au lit ». Il a été introduit en français au XVIe siècle par Rabelais. Il a été appliqué aux personnes déguisées pendant la carnaval. À partir de cet emploi, son sens s’est étendu pour désigner le désordre, le tumulte, les manifestations. 

Le mot a de l’écho, mais pas l’effet recherché : loin de calmer les troubles, il est repris par les étudiants pour s’en moquer. Une célèbre caricature reprend le képi, le long nez et la position topique du général, les bras en l’air en forme de « v » de la victoire, accompagné d’un slogan sous forme de réplique, « la chienlit, c’est lui ! ». 

la chienlit c est lui de gaulle mai 1968
Gallica.fr

Une autre caricature représente le même De Gaulle, mais dont les bras sont comme en train de fondre : « la chienlit c’est encore lui ! ».

 

la chienlit c est encore lui
Gallica.fr

L’emploi du terme « chienlit » est aujourd’hui le plus souvent marqué par la référence au général de Gaulle et à mai 1968. Ainsi, il a par exemple été repris par Nicolas Sarkozy, ancien président de la République, à propos de troubles sociaux survenus à Air France en 2015.

« C’est la chienlit, c’est le délitement de l’Etat »

 

À lire en cliquant ici : qui a dit « il faut terroriser les terroristes » ?

 

À lire


Mathias Bernard, Histoire politique de la Ve République. De 1958 à nos jours

Alain Garrigou, La politique en France. De 1940 à nos jours

Boris Gobille, Mai 1968