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Lune de miel : définition & origine [expression]

Publié le 22/05/2020 (m.à.j* le 24/02/2023)
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La « lune de miel » désigne : les premiers temps du mariage, la période de tendresse et d’amour au début du mariage. Par extension : une période de bonne entente entre deux personnes, deux entités, etc. « Lune de miel » semble être un calque de l’anglais honeymoon. Honey, « miel », a en anglais une connotation méliorative. Aux États-Unis, honey veut même dire « mon/ma chéri(e) ». La lune symbolise le cycle du mois. On trouve un syntagme qui s’en approche chez Voltaire (1694 – 1778) : « Zadig éprouva que le premier mois du mariage, comme il est écrit dans le livre du Zend, est la lune du miel, et que le second est la lune de l’absinthe. » (Zadig, 1747)/ Zadig est perse, et en Iran, aujourd’hui encore, pendant le mariage, les mariés plongent un doigt dans un verre rempli de miel, pour le faire goûter l’un à l’autre, afin que leur vie de couple soit « sucrée » (douce). L’expression « lune de miel » devient usuelle dans la littérature française à partir du XIXe siècle, mais ne désigne pas encore le « voyage de noces ». 

La pratique du « voyage de noces », ainsi que l’expression « lune de miel », deviennent courantes à la Belle Époque (la période allant de la fin du XIXe à la Première Guerre mondiale). C’est, selon l’historien Sylvain Veneyre, un des symptômes de l’autonomisation du couple par rapport à la famille de chacun des époux. Les deux mariés forment une nouveau ménage, plus indépendant que pouvaient l’être les familles traditionnelles. Ils s’isolent juste après le mariage pour solidifier leur union. Cette expression peut au reste avoir une dimension ironique : s’il y a lune de miel, il y a ensuite entrée dans l’ordinaire de la vie de couple, où l’amour s’éteint pour laisser place à l’indifférence, à une plate affection ou à la détestation. 

Exemples 

  • Ces deux jeunes tourtereaux ont décidé de passer une longue lune de miel bien loin de leurs proches, dans la lointaine et froide Islande.

La Tamise bordait le gazon d’un cottage à demi caché sous un cèdre du Liban, et parmi des saules pleureurs : un couple nouvellement marié était venu passer la lune de miel dans ce paradis.

Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe

Cette expression, lune de miel, est un anglicisme qui passera dans toutes les langues, tant elle dépeint avec grâce la nuptiale saison, si fugitive, pendant laquelle la vie n’est que douceur et ravissement ; elle restera comme restent les illusions et les erreurs, car elle est le plus odieux de tous les mensonges. Si elle se présente comme une nymphe couronnée de fleurs fraîches, caressante comme un syrène, c’est qu’elle est le malheur même ; et le malheur arrive, la plupart du temps, en folâtrant.

Balzac, Physiologie du mariage

Elle songeait quelquefois que c’étaient là pourtant les plus beaux jours de sa vie, la lune de miel, comme on disait. Pour en goûter la douceur, il eût fallu, sans doute, s’en aller vers ces pays à noms sonores où les lendemains de mariage ont de plus suaves paresses ! Dans des chaises de poste, sous des stores de soie bleue, on monte au pas des routes escarpées, écoutant la chanson du postillon, qui se répète dans la montagne avec les clochettes des chèvres et le bruit sourd de la cascade. Quand le soleil se couche, on respire au bord des golfes le parfum des citronniers ; puis, le soir, sur la terrasse des villas, seuls et les doigts confondus, on regarde les étoiles en faisant des projets. 

Flaubert, Madame Bovary