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« Avoir affaire » ou « avoir à faire » ?

Publié le 07/01/2018 (m.à.j* le 16/02/2022)
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« Avoir affaire » et « avoir à faire » sont des homophones : ces locutions se prononcent de la même manière, mais ont des sens différents.

 

Avoir affaire à : être en rapport avec


Locution synonyme de « être en rapport avec », « se trouver en présence de quelqu’un ».

Affaire ne prend pas de « s ». L’expression peut avoir une teinte de confrontation ou de menace.

Exemples :

S’il s’approche de ma maison, il aura affaire à moi.

Ce n’est pas la première fois que cette cambrioleuse a affaire à la justice.

Lorsque je me couche tôt, j’ai affaire à des angoisses.

J’ai affaire au ministre

Académie française

 

Il vaut mieux avoir affaire au bon Dieu qu’à ses saints.

PéguyLe Porche du mystère de la 2è vertu, cité par le TLFi

 

C’était le capitaine de Hauteclocque. Il arrivait de France, par l’Espagne, la tête bandée sur une blessure qu’il avait reçue en Champagne et passablement fatigué. Il vint se présenter à moi qui, voyant à qui j’avais affaire, réglai sa destination sur-le-champ.

De GaulleMémoires de guerre, L’Appel, cité par le TLFi

 

 

À lire en cliquant ici : « accompte » ou « acompte » ?

 

Avoir affaire avec 


Il existe la forme « avoir affaire avec », qui se distingue difficilement de « avoir affaire à ». On a plutôt « affaire avec quelqu’un » pour traiter de quelque chose. Il existe en effet dans « avoir affaire avec » une réciprocité qui n’existe pas dans « avoir affaire à » (cf. Le Bon Usage).

Exemples :

J’ai affaire avec le directeur, pour décider de l’avenir de cet élève.

Quoique Olivier eût souvent affaire avec lui, ils se voyaient très peu.

Rolland, Jean-Christophe

J’ai affaire avec ces pauvres hommes de la terre

Duhamel, Souvenir de la vie du paradis, cité par le Grevisse

 

Elle venait de sortir, accompagnée de Poiret, pour aller trouver le fameux chef de la police de sûreté, petite rue Sainte-Anne, croyant encore avoir affaire à un employé supérieur nommé Gondureau.

Balzac, Le Père Goriot

 

Avoir à faire : définition


Locution synonyme de « avoir à réaliser » ou « devoir effectuer ».

Elle permet de parler d’un travail à réaliser, d’une obligation à remplir. Elle est le plus souvent suivie d’un COD (« avoir à faire quelque chose »). 

Exemples :

Avoir à faire est toujours mieux que de s’ennuyer.

J’ai plein de choses à faire pour préparer la fête de la semaine prochaine.

N’oublie pas que tu as à faire tes devoirs pour demain !

 

« Qu’est-ce que j’ai à faire dans le monde ? Les autres s’évertuent pour la richesse, la célébrité, le pouvoir ! Moi, je n’ai pas d’état, vous êtes mon occupation exclusive, toute ma fortune, le but, le centre de mon existence, de mes pensées.

Flaubert, L’Éducation sentimentale

 

Avoir affaire de : avoir besoin de


Locution synonyme de « avoir besoin de ».

Cette expression littéraire n’est plus employée aujourd’hui.

Exemples :

J’avais affaire de son assistance.

Qu’ai-je affaire de l’estime de gens que je ne puis estimer ?

Gide, Feuillets d’automne, cité par le Grevisse

 

À lire en cliquant ici : ce qui s’ensuit ou ce qui s’en suit ?

Les auteurs du Bon Usage remarquent que la graphie « avoir affaire à » est née de l’habitude plutôt que de la raison. Selon le Littré, avoir affaire de « ne peut être considéré comme une faute ; car à faire convient mieux qu’affaire ».

Ainsi, on rencontre dans littérature la graphie « avoir à faire » au sens de « avoir affaire à ».

Exemples :

Il faut qu’il ait à faire à quelque vainqueur

Saint Beuve, Port Royal, cité par le Grevisse

 

C’est ce que vit peut-être M. de Rebours, à qui il eut d’abord à faire

Mauriac, Blaise Pascal et sa soeur Jacqueline

 

Des enfants pataugent, qui portent un collier pour tromper les démons et leur faire croire qu’ils ont à faire à des chiens

Morand, Rien que la terre