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Faire « bonne chère » ou « bonne chair » ? (orthographe)

Publié le 02/11/2020 (m.à.j* le 15/03/2024)
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On écrit : faire bonne chère. « Chère », du bas latin cara, « visage », emprunté au grec kara, κάρα, « tête, visage », ne se maintient plus que dans cette expression, qui signifiait littéralement « faire bon visage », c’est-à-dire « faire bon accueil » à quelqu’un, mais dont le sens a dérivé vers « faire un bon repas », peut-être sous l’influence de son homophone chair (« viande »). L’expression dénote l’idée que faire un bon repas fait partie du bon accueil.  La confusion avec « chair », qui paraît plus logique, est donc bien naturelle. En effet, le sens originel de cette expression, qui se maintient dans l’usage, n’est, bien sûr, plus senti aujourd’hui. Sa tonalité ancienne, voire médiévale (elle apparaît au XIVe siècle), est peut-être ce qui séduit encore chez elle.

À lire ici : quelle différence entre « chair », « cher » et « chère » ?

Exemples avec faire bonne chère

Harpagon : Dis-moi un peu : nous feras-tu bonne chère ?

Maître Jacques : Oui, Si vous me donnez bien de l’argent.

Harpagon : Que diable, toujours de l’argent ! Il semble qu’ils n’aient autre chose à dire : de l’argent, de l’argent, de l’argent ! Ah ! ils n’ont que ce mot à la bouche, de l’argent ! toujours parler d’argent ! Voilà leur épée de chevet, de l’argent !

Valère : Je n’ai jamais vu de réponse plus impertinente que celle-là. Voilà une belle merveille de faire bonne chère avec bien de l’argent ! c’est une chose la plus aisée du monde, et il n’y a si pauvre esprit qui n’en fît bien autant ; mais, pour agir en habile homme, il faut parler de faire bonne chère avec peu d’argent.

Maître Jacques : Bonne chère avec peu d’argent !

Valère : Oui.

Maître Jacques, à Valère : Par ma foi, Monsieur l’intendant, vous nous obligerez de nous faire voir ce secret, et de prendre mon office de cuisinier ; aussi bien vous mêlez-vous céans d’être le factoton.

Harpagon : Taisez-vous. Qu’est-ce qu’il nous faudra ?

Maître Jacques : Voilà monsieur votre intendant, qui vous fera bonne chère pour peu d’argent.

L’Avare, III

Homais se délectait. Quoiqu’il se grisât de luxe encore plus que de bonne chère, le vin de Pomard, cependant, lui excitait un peu les facultés, et, lorsque apparut l’omelette au rhum, il exposa sur les femmes des théories immorales.

Flaubert, Madame Bovary

À lire : « exaucer » et « exhausser », quelle différence ?